Black Dog
7.3
Black Dog

Film de Guǎn Hǔ (2024)

Je n'arrive pas à avoir un avis clair et définitif sur ce film. Dérouté autant par la forme autant que par le fond, car la métaphore sur la situation de la Chine moderne me paraît trop appuyé et son orientation idéologique n'est pas non plus des plus évidentes. Le scénario semble dénoncer l'inertie, ainsi que la gabegie de l'état chinois afin de donner des gages démocratiques à l'occident au moment de l'organisation des Jeux olympiques de Pékin.


Mais dans le même mouvement, le financement ainsi que la production semblent avoir eu l'aval des autorités. Il est d'ailleurs très peu question de révolte populaire, et le dénuement d'ensemble de la province dont il est question paraît plus du fait de l'indolence de celle-ci que d'une quelconque responsabilité politique intérieure (c'est en tout cas ce que laisse transparaître les alternoiements des personnages). Cela ne l'empêche pourtant pas d'emprunter des chemins de traverse, et c'est sans doute cette ambiguïté qui rend l'ensemble assez fascinant.


Le mutisme du revenant est par exemple l'un des aspects les plus impactants, tout autant que l'humour minimaliste qui compose certains des plans les plus intéressants. On peut également noter l'alternance entre des strates de séquences contemplatives et l'irruption soudaine d'affrontements brutaux, de sorte que nous soyons bien en peine de le categoriser dans un genre bien précis. La mise en scène est au diapason de ce morcellement narratif. Tantôt des plans larges filmés en contre plongée (sans doute des drones) lorsque les paysages désertiques exigent le silence des errants. Tantôt des cadres ultras resserrés caméra à l'épaule pour instaurer la tension et la peur.


C'est souvent judicieux, car on laisse les personnages s'imprégner de l'environnement. C'est parfois un brin ostentatoire, lorsque le cinéaste semble l'utiliser comme un gimmick pour surligner la dilatation du temps. Le film aurait gagné à faire certaines coupes au montage, car les 120 minutes ne semblent pas complètement justifiées. On pourrait de même analyser la façon dont les animaux apparaissent, et la signification qu'on leur assigne pour appuyer la parabole.


Voici quelques éléments auxquelles je pense instantanément pour expliquer mon ressenti. Quoiqu'il en soit, il est essentiel que ce genre de proposition puisse continuer d'exister. C'est dans cette marge cinématographique que l'on puise encore les théories analytiques les plus passionnantes à produire.

Sabri_Collignon
7
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le 18 mars 2025

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