« I am your King now ! » T’CHALLA

En 1998, le film Blade réalisé par Stephen Norrington a été un nouveau souffle dans le monde super-héroïque et a inscrit dans la légende son acteur principal : Wesley Snipes. La prestation de l'acteur dans les trois (deux !) films Blade a marqué les esprits, et faisait forcément de lui le premier choix pour incarner Black Panther dans les années 90, lorsque le projet était déjà en développement. 

Un mariage qui aurait pu avoir son effet au cinéma, mais que nous ne verrons jamais parce qu’au début des années 90, le nom de Black Panther ne faisait pas penser au comics book, mais plutôt au groupe révolutionnaire afro-américain. Difficile de vendre le projet auquel, même Stan Lee, était impliqué.

Il faut attendre plus de vingt ans plus tard, en 2018, avec le Marvel Cinematic Universe (MCU) de Kevin Feige pour que le projet refasse surface lors de la Phase III de The Infinity Saga. 

Se situant à la suite de Captain America : Civil War, on retrouve T’Challa qui doit succéder à son défunt père sur le trône du Wakanda. Ce pays situé en Afrique est une monarchie cachée aux yeux du monde. Sa population a prospéré grâce au vibranium, un métal aux propriétés extraordinaires. Cette bulle utopique n’a jamais été colonisée ni pillée. La prise de pouvoir de T’Challa va se compliquer quand Killmonger, qui a grandi aux États-Unis, revient pour venger le meurtre de son père.

C’est Ryan Coogler qui est en charge de l’écriture et de la réalisation. Ryan Coogler avait été révélé avec son Fruitvale Station en 2013, un petit film qui revenait sur une bavure policière sur fond de tension raciale, puis il avait enchaîné avec Creed en 2015 marquant un peu plus son cinéma afro-américain.

Chadwick Boseman est logiquement de retour sous le costume de Black Panther après avoir interprété T’Challa dans Captain America : Civil War et il sera opposé à Killmonger interprété par Michael B. Jordan qui a déjà travaillé avec Ryan Coogler sur Fruitvale Station et Creed. La symbolique est énorme de faire un affrontement entre Chadwick Boseman et Michael B. Jordan. 

Le premier rôle de Chadwick Boseman est un certain Reggie Porter Montgomery dans la série All My Children en 2003. Il fera un seul épisode avant de se faire virer car il jugeait le personnage trop stéréotypé (la racaille noir du quartier) et voulait changer son comportement. Il se fera remplacer par Michael B. Jordan qui héritera du personnage pendant trois ans et surtout des changements que Boseman voulait pour le personnage. 

Au delà de cette anecdote, Chadwick Boseman et Michael B. Jordan ravivent le combat mythique pour les droits civiques des années 50-60 qui ne peuvent être considérés comme achevés, puisque les avancées sont sans cesse remises en question aux États-Unis. Le jeune roi T’Challa face à son cousin, Killmonger, ravivent le conflit entre Martin Luther King et Malcolm X et leurs divergences quant à la réponse à apporter au racisme. Chadwick Boseman ne représente il pas le grand échec de la communauté noire sous une forme de conformisme ? Sa réticence à la radicalité devient une forme d’acceptation de la violence ? Dans un premier temps, il souhaite que le Wakanda reste à l’écart des conflits, dissimulée. Malgré son opulence, le Wakanda ne vient pas en aide au peuple noir qui souffre dans le reste de l’Afrique ou en Amérique du Nord. Extrémiste dans son désir de vengeance, Michael B. Jordan a bien l’intention de s’emparer de la puissance du Wakanda pour rassembler la population noire en une armée prête au combat, une guerre raciale et donc raciste, où la haine envers celui qui est différent doit conduire à sa soumission.

L’imposant Michael B. Jordan excelle en ambiguïtés, c’est un Malcom X revu et corrigé pour notre époque. Sa rancœur est dictée par la réalité des faits. Il sera le déclic puissant qui éveillera la conscience de Chadwick Boseman, c’est lui qui va le contraindre à s’extirper de son retrait royal, du conformisme embourgeoisé pour enfin lutter afin d’unir son continent. 

Alors que l’un veut répondre aux inégalités raciales, aux affronts faits au peuple noir par le silence, la neutralité, l’autre veut foudroyer ses ennemis de sa colère et imposer la suprématie noire sur le globe. Un débat qui divisait déjà la communauté noire aux États-Unis dans les années 50-60.

Dans un compromis et un équilibre réfléchi, Ryan Coogler essaye d’apporter une réponse, mais elle doit être mesurée. Si il n’y a pas une pensée blanche aux États-Unis, l’unicité des points de vue chez la population noire est tout aussi chimérique. Et les chemins des deux jeunes protagonistes qui vont grandir en adversaires reflètent cette inégalité de départ.

Si le scénario répond à toute mes attentes, ce n’est clairement pas le cas de la mise en scène. Je me suis perdu dans toute cette bouillie visuelle surtout lors des affrontements et tout particulièrement lors du combat final entre Chadwick Boseman et Michael B. Jordan.

Je ne comprend pas que Hannah Beachler reparte avec l’Oscar des meilleurs décors tant l’utilisation des effets spéciaux saute aux yeux. Par contre, c’est beaucoup plus compréhensible que Ruth E. Carter remporte l’Oscar de la meilleure création de costumes.

Black Panther remporte un troisième Oscar, celui de la meilleure musique de film pour Ludwig Göransson qui avait déjà travaillé avec Ryan Coogler sur Fruitvale Station et Creed. Pour sa bande originale, il n’hésite pas à mettre en avant des artistes afro-américains comme Kendrick Lamar, The Weeknd, Travis Scott et plein d’autres.

Il serait injuste de ne pas citer le casting secondaire qui participe à rendre le Wakanda cohérent. Le casting féminin est très présent avec Lupita Nyong’o, Danai Gurira, Letitia Wright ou encore Angela Bassett. On est très loin des figures de femmes ayant besoin d’un super-héros ou de love interest, ce sont des femmes fortes et des grandes figures du Wakanda.

Du côté des hommes, dans les rôles secondaires, on a le vétéran Forest Whitaker avec son fils Denzel Whitaker, mais aussi Daniel Kaluuya et Winston Duke. Ils montrent que l’unicité n’est pas présent au Wakanda, comme dans le reste du Monde, ils ont chacun un point de vue et vont l’affirmer au cours de cette affrontement idéologique.

On retrouve aussi Martin Freeman qui reprend son personnage venant de Captain America : Civil War et Andy Serkis qu’on avait aperçu dans Avengers : Age of Ultron.

On n’oublie pas le cameo plutôt amusant de Stan Lee qui, je le rappel, a crée le personnage avec Jack Kirby en 1966.

Black Panther est un énorme carton avec ses 1.300.000.000 $ récoltés au box office. C’est surtout aux États-Unis où il fera venir du monde dans les salles. C’est satisfaisant de savoir que tout une communauté se retrouve derrière un super-héros et je laisse le mot de la fin à Wesley Snipes qui a failli incarner Black Panther dans les années 90 :

Je suis ravi, surexcité et extatique. Je pense que cela va avoir un impact sur les communautés, l'industrie du cinéma, mais aussi les esprits de ceux qui en font partie […] Cela va ouvrir de nouvelles opportunités et surtout ne pas s'arrêter de grandir.
StevenBen
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films Marvel

Créée

le 9 nov. 2022

Critique lue 13 fois

Steven Benard

Écrit par

Critique lue 13 fois

D'autres avis sur Black Panther

Black Panther
Sergent_Pepper
7

Coming out of Africa

Alors qu’on n'attend plus rien du mastodonte Marvel, qui ne cesse de ronronner même dans les supposées nouveautés de sa franchise (les promesses non tenues du deuxième Gardiens de la Galaxie, la...

le 28 févr. 2018

92 j'aime

14

Black Panther
Yayap
3

Wakandon't

Après un cru 2017 plutôt satisfaisant, le Marvel Cinematic Universe continue son entreprise de suprématie absolue sur le genre superhéroïque au cinéma. Black Panther est le premier gros coup des...

le 6 mars 2018

73 j'aime

5

Black Panther
Behind_the_Mask
6

Je règle mon pas sur le pas de mon père

Ouvrant le bal super héroïque de l'année 2018, Black Panther devait représenter un nouveau départ, une réinvention de la Maison des Idées. Oui... Mais encore ? Une mise en avant du vocable...

le 14 févr. 2018

69 j'aime

25

Du même critique

Marvel’s Spider-Man 2
StevenBen
10

« Spider-Man didn’t save me back there, Miles did. » PETER PARKER

En 2023, cinq ans après Spider-Man et trois petites années après Spider-Man : Miles Morales, les hommes araignées reviennent dans une suite directe aux aventures des deux super-héros. Le studio...

le 4 janv. 2024

2 j'aime

L'Initiation - Dragon Ball, tome 3
StevenBen
7

« Si tu veux un conseil, n’utilise pas toute ta force… » SANGOKU

Comme la majorité des jeunes français, j’ai connu Dragon Ball le 02 mars 1988 sur TF1, dans le Club Dorothée. J’étais loin de me douter que ce dessin animé était l’adaptation d’une bande dessinée,...

le 18 oct. 2022

2 j'aime

3