Je ne suis pas un grand fan de Ridley Scott mais je gardais un souvenir plutôt bon de Black rain. Trente ans plus tard, la douche est un peu semblable à cette pluie noire qui s’abat sur le Japon. Pur produit des années 80 (qui n’ont, pour le coup, pas donné beaucoup de bons polars), le film lorgne du côté de son frère Tony avec sa réalisation très clipesque, le rythme en moins. Michaël Douglas, toujours aussi charismatique, incarne un flic très caricatural aux méthodes expéditives, au vocabulaire fleuri et à la moralité douteuse qui se heurte forcément à la culture japonaise. Ken Takakura, tout en retenu, est parfait face à un Andy Garcia très « paccinesque » dans son jeu. Kate Capshaw complète le casting pour donner une touche féminine qui ne s’imposait pas.
L’histoire n’a rien d’original et le film est sans surprise. Le flic amerloque, tête brûlée et tête de bois, ne va en faire qu’à sa tête justement pour atteindre son objectif, entraînant le rigide flic jap hors de ses sentiers battus. Dans une ambiance sombre (on n’est pas loin de Blade runner) avec de nombreuses scènes nocturnes ou grises, la musique très synthétique de Hans Zimmer, quelques éclairs de violence parfois gratuits, le film n’est pas inintéressant, loin de là, mais il accumule les clichés et appuie beaucoup trop ses effets (soleil couchant, soleil levant, ralentis, musique larmoyante ou pétaradante). Du coup, le film ne brille pas par sa finesse et se révèle très maladroit, le temps mettant en évidence plutôt ses faiblesses, ce qui n’est jamais bon signe.
Le résultat n’est pas mauvais même s'il est artificiellement poisseux et trop tape-à-l’œil pour être totalement convaincant. L’enchainement de péripéties parfois saugrenues manque ici ou là de tonus, et la fin laisse perplexe sur la véritable évolution de certains personnages, mais on trouve aussi de bonnes scènes d'action et des moments de tension parfaitement gérés à des moments charnières du récit. S’il est décevant trente ans après sa sortie, le film reste un des polars acceptables des années 80, flirtant entre le polar urbain, le polar exotique et le polar mafieux. Il a, en outre, quinze ans après Yakuza, le mérite de poser ses valises au pays du soleil levant, ce qui est plutôt rare dans le genre. L'ensemble aurait évidemment gagné à être épuré dans sa mise en scène, à être plus nerveux dans son traitement et à être plus novateur au niveau de son récit. Autrement dit, il aurait été préférable que le fond soit plus recherché que la forme. Difficile ensuite d'accuser les années 80 d'avoir été moins inspirées que les années 70 et de vieillir plus mal.