Black Sheep par Kroakkroqgar
En tant que nanar réussi, ‘Black Sheep’ est probablement un des paradoxes cinématographiques les plus étonnants qu’il soit. Le scénario abruti, le jeu navrant des acteurs, les mauvaises répliques, les effets spéciaux cheap, la mise en scène décevante, l’abus de trash : tout ce qui aurait dû en faire un film détestable travaille ici au service d’une comédie culte.
En effet, les caractéristiques du mauvais film en ‘Black Sheep’ sont ici réfléchies et dosées avec attention. Loin des foutraques nanars à monstre habituels, l’œuvre cache une certaine intelligence dans le déroulement de son récit. Par exemple, le laïus sur les flatulences animales d’Experience constitue déjà un gag en soi, mais il retrouve une utilité sur la fin du récit. De la même manière, l’intrigue ne laisse aucun élément au hasard, hormis évidemment la crédibilité d’une attaque de mouton carnivore.
Dans le même esprit, les dialogues de ‘Black Sheep’ sont moins débiles qu’il n’y paraît. Que Tucker réponde « Non t’as pas le temps » après que le héros se soit exclamer « Je les encule les moutons », que les séances zen finissent pas amener un « je ne suis pas un chêne, je suis un mouton » ou que Angus craigne de se transformer « en hippie » prouve bien que les dialogues idiots n’ont que pour objectif de faire rire. Et la direction des acteurs fait également tout pour aller dans ce sens, tant on oscille entre sur-jeu et détachement ubuesque.
A côté de ça, les scénaristes et le réalisateur semblent s’autoriser tout ce que passe par leur tête quitte à tomber dans le trash. Sans parler des effusions de sang et des nombreux plans gores qui parsèment le film, ‘Black Sheep’ dépasse les bornes de la bienséance en abordant la zoophilie sans retenue, puis avec un plan explicite particulièrement osé lors de la mort d’Angus. Si ces accès de mauvais goût risquent de ne pas plaire à tout le monde, ils dénotent d’une témérité burlesque évidente.
Mais ‘Black Sheep’ pourrait finalement se résumer en quelques passages, moments de génie hilarants et inoubliables. Si la courte minute de combat dans la voiture enchaîne les gags à une vitesse hallucinante, c’est surtout le final explosif qui achèvera d’abasourdir le spectateur.
Un chef d’œuvre du nanar.