Cher Sammo Hung Kam-Bo,
Cela fait très longtemps que nous nous sommes pas vus, vous dans l'écran, et moi devant, vous regardant dans la série "Le Flic de Shanghaï", vous étiez super cool, vous formiez un duo atypique avec votre ami afro-américain, Arsenio Hall, lui non plus je ne l'ai plus trop aperçu. Quoi qu'il en soit, j'espère que vous vous portez bien.
Mais dites-moi monsieur Sammo, vous êtes un petit cachotier, non ? Je ne vous connaissais qu'en tant qu'acteur, mais ce n'est que très récemment que j'ai appris votre talent pour manier la caméra. Ma surprise a été tout aussi vive que mon initiative à voir vos films. Le premier en tête de liste intitulé "Blade of Fury". Faut dire que vous avez un fan qui l'a vachement bien vendu, j'ai nommé Zombiraptor. Alors, j'ai sauté le pas pour voir ce que vous saviez faire aux commandes d'une production, et le moins que je puisse dire, c'est que je n'ai pas été déçu, oh que non.
L'histoire que vous avez mis en scène est des plus passionnantes. Elle démarre sur une situation d'entraînement de Wu (je ne connais pas le nom de l'acteur qui tient son rôle, vous pourriez m'éclairer ?). Celui-ci est le dernier survivant de l'ordre du drapeau noir, après qu'il se soit battu en vain avec les siens contre les forces armées chinoises. Il a bien fallu qu'il se reconvertisse, vous l'avez donc assigné à la tâche de forgeron. C'est au détour d'une lutte entre des brigands et une nouvelle armée dirigée par Yuan Shikai que, vous lui faites faire la connaissance de plusieurs personnages importants liés au gouvernement et qui vont apporter chacun à leur un tour une pierre à l'édifice du renouveau chinois, ou pour certains empêcher qu'elle se concrétise complètement.
Votre film monsieur Sammo concentre une ribambelle de thèmes et de principes qui vous semblent vitaux, et c'est peu de le dire. Je ne doute pas des influences du cinéma asiatique dont certaines oeuvres pourraient se rapprocher de la vôtre, les thématiques ne sont pas seulement touchées du doigts, elles m'ont touché en plein coeur. Vous avez su aborder des concepts comme la loyauté ou l'amitié qui se retrouvent au milieu d'enjeux, et qui poussent vos personnages à prendre des décisions qui ne les amènent pas toujours dans le même sens, ce qui les conduit logiquement à faire l'objet de traîtrises et de coups bas perfides. Vous avez pensé à tous les éléments utiles pour livrer un long-métrage digne de ce nom en son genre qui est le kung-fu et le maniement du sabre. D'ailleurs, parlons de ces deux derniers points, puisque sans vos combats le film perdrait une grande part de son âme.
Mon respect monsieur Sammo ! Oui, je suis comme ça, je vous félicite avant même d'émettre le pourquoi du comment. La mise en valeur des combats est terriblement bonne, vos chorégraphies sont toutes excellentes et viennent souvent ponctuer un dialogue de manière très juste. Les dialogues ne tournent jamais autour du pot, ils sont directs sans être mal amenés, on ne sent pas de l'impulsivité inappropriée, les protagonistes comme les antagonistes savent se taire ou se retirer quand il faut. Je pourrais relever un paquet de citations qui m'ont fortement plu, conférant une âme poétique à votre film, des instants de bonheur comme des instants de repos. Pour en revenir aux combats, j'ai apprécié le fait qu'ils soient variés, ils ne se ressemblent pas, c'est très bien monsieur Sammo ! On baigne dans de la pure folie, entre des corps décapités, la vitesse des mouvements et quelques situations burlesques (hé, petite déviation si vous me le permettez Sammo, c'est quoi ce cheval qui fracasse un mur ? Je veux le même, il doit être solide comme un roc, quelle robustesse tout de même !). On assiste donc à un déchaînement de puissance significative, les combattants laissent exprimer leur rage au profit de leurs idéaux. Toutes les scènes ne sont pas parfaitement lisibles, mais le montage est de qualité et permet à chaque moment de se centrer sur les diverses attitudes adoptées par les intervenants de l'intrigue, on ressent la furie des coups placés et on sait éperdument que chaque coup porté rapproche les personnages un peu plus de leur but, ou de leur tragique mort. En clair, monsieur Sammo vous avez réussi à dépeindre la tension des événements à travers des altercations expérimentales et hallucinantes de maîtrise. De votre maîtrise.
Vos maladresses et les petits soucis de pellicule s'avèrent anecdotiques, je ne vous en tient pas rigueur cher Sammo, sachez le ! Néanmoins, pour le spectateur occidental que je suis, ce ne fut pas aisé de rentrer tout de suite dans votre film. Entre les nombreuses têtes pensantes divisées de par les différentes factions, il n'est pas toujours facile de s'y retrouver. Mais pour une telle fresque, il serait importuné de négliger les musiques, mais venons-en. Elles sont somptueuses, le soin qui leur est apporté rend l'aventure encore plus belle, plus exaltante. Remerciez le compositeur de ma part, s'il vous plaît.
Dès les premières minutes de votre film, celui-ci est parvenu à me transporter. Il m'a donné cette sensation que j'allais vivre un moment de cinéma Hongkongais fort, intense et sincère. J'ai toujours été bon client des histoires politiques dans lesquelles on y voit des personnages charismatiques, impliqués et dévoués à faire valoir ce qu'il leur semble le moins néfaste. La pression est maintenue jusqu'au dénouement final, et elle le doit aux séquences de combats dynamiques qui évitent les concessions et auxquelles on assiste avec jubilation. Une oeuvre presque théâtrale et au charme dévastateur. Vous l'avez fait Monsieur Sammo, et je m'en souviendrai, soyez sans crainte (autrement, pour tous ces compliments, voudriez-vous me mettre en relation avec Cynthia Khan ? Le degré d'amour que je lui porte a atteint sa beauté, elle est tellement confortée dans son rôle...).
Bien amicalement,
Eren.