Défense de la rondeur
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le 7 août 2020
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Long-métrage d'animation de Sung-ho Hong (2019)
En 2020, le cinéma animé coréen (du sud, évidemment) m’a troublé avec Lily à la découverte du monde sauvage (Oh Seongyun) et amusé avec Nous, les chiens (Chun-Baek Lee, Seong-yun Oh,). Je pouvais donc me permettre de lui accorder à nouveau ma confiance dans ces salles obscures désertées.
Comme le titre français à rallonge le suggère, le métrage propose une histoire s’amusant avec les contes de fées européens, une aventure avec des personnages hauts en couleurs et qui dispose d’un message, bien que mal exploité.
Blanche Neige est la fille du roi, une petite princesse toute en rondeurs, qui n’accepte pas la disparition de son père, liée à juste titre avec l’apparition d’une belle-mère sorcière et manipulatrice.
Les souliers rouges sont la matérialisation des pommes d’un arbre magique, sensés accorder jeunesse et beauté, que la marâtre cultivait à son profit. Blanche Neige s’en empare, en les chaussant elle devient une belle et svelte jeune femme qui va faire la rencontre d’une équipe de petites personnes.
Les sept nains sont verts, petits, aventuriers mais fortement présomptueux. Mais ce que personne ne sait c’est qu’ils étaient connus auparavant comme les Sept intrépides, fougueux héros du royaume. Ils ont été ainsi maudits pour avoir attaqué la reine des fées, croyant avoir affaire à une créature maléfique. Ne supportant pas cette condition, ils se cachent, à la recherche de leur remède, le baiser d’une princesse.
Blanche Neige et les nains vont se rencontrer, ceux-ci acceptant de l’aider. Leur rencontre se fait donc sous le signe de la tromperie, Blanche Neige n’est pas la charmante jeune femme que son allure laisse croire, les nains recherchent le baiser qui les délivrera de leur apparence.
Et si cette idée est intéressante, elle peine malheureusement à se déclarer, enfouie sous des conventions du genre assez classiques, avec la méchante marâtre, ses alliés, des péripéties dans une aventure avant tout dédiée aux enfants.
Le film avait pour lui son thème de l’acceptation de la différence, de la tolérance vis à vis des différences physiques. Il aurait pu être son joyau, sur lequel s’appuyer, d’autant plus en ces périodes où le sujet fait l'actualité. Mais il l’exploite surtout via sa romance entre Blanche Neige et Merlin, un des nains, sans aucune volonté d’être universel, d’en faire un message fort qui s’applique à tous. L’idée est louable, elle est intéressante, mais elle semble encore trop timidement utilisée.
Le métrage souffre aussi de ces personnages engoncés dans leurs traits de caractère, évidents et simples, présentés ainsi sans possibilité d’évolution. Seul Merlin en ressortira différent. Cette distribution peut agacer, car certaines décisions ne sont pas comprises, à l’image des choix de Blanche Neige et des sept nains à préserver leurs mensonges. Le film semble avoir de la mal à se raconter, à nous présenter son déroulé. Des scènes semblent manquer, malgré le format traditionnel des 1h32 minutes, comme l’arrivée de Merlin dans le château via le passage secret, abandonnée par la suite pour une nouvelle étape qui se raccorde mal.
Il est encore trop tôt pour avoir des informations sur la production du film, et l’éloignement géographique ne facilitera pas leur communication, mais on peut supposer quelques difficultés, dans la mise en scène de l’histoire, dans la construction de ses personnages ou dans l’évocation de ses sous-thèmes.
En 2017, le film avait fait (un petit) scandale au festival de Cannes, une campagne publicitaire montrait les deux Blanche Neige avec l’accroche “et si Blanche Neige n’était plus belle et les sept nains plus si petits ?”. Les réseaux sociaux accusèrent le film de “body shaming”, ce qui est cocasse à la vue du résultat, mais on peut se demander si cette polémique a pu agir dans la production de ce long animé.
En reprenant à son compte l’univers des contes de fées et en les mélangeant, quitte à enlever leur noirceur originale, le film semble aussi parfois un peu trop répondre aux critères esthétiques internationaux du film d’animation. Mais est-ce que ce n’est pas parfois par malice ? La marâtre semble sortie du Raiponce de Disney, la “belle” Blanche Neige sort du même moule. Faut-il voir une (prudente) critique contre les codes établis par la grande compagnie aux oreilles rondes et un certain culte de la jeunesse et de l’apparence ?
Car, même si le film ne jouit pas d’une technique particulièrement remarquable, il l’utilise tout de même pour une mise en scène convenablement troussée. On peut même y déceler quelques belles idées graphiques, qui donnent du corps au film, à l’image du palais du prince, de la représentation du miroir parlant ou de la maison des nains. Quelques petites touches plus originales, mais qu’on aurait aimé un peu régulières.
Blanche Neige, les souliers rouges et les sept nains écorne un peu l’image que je gardais du cinéma coréen, probablement trop vite habitué à des productions plus exigeantes, là où celui-ci est et reste un divertissement quand même plaisant, mais pas assez rafraichissant, parfois mal assuré dans ce qu’il propose ou veut nous dire.
Le film profite bien entendu d’un doublage français, malheureusement lui aussi pas assez convaincant. Melha Bedia semble avoir été choisie parce que c’est une personnalité ronde en formes, qui sait s’amuser de son physique, mais son ton grave semble mal adapté à son personnage. Certaines répliques peuvent agacer, comme le “tu as été merlinisé”, atroce, mais cela vient peut-être de la version originale. Les accents des nains ont été rabotés, pour ne garder que ceux italiens de trois d’entre eux. Ce ne sont pas des choix vraiment importants, l’adaptation faisant ce qu’elle peut, mais il faudrait peut-être comparer avec d’autres versions pour voir si notre version française ne serait pas en dessous.
Créée
le 25 août 2020
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