Il y a de très bons moment dans Bleeder: la surprise de découvrir un mads Michaelsen en magnifique looser, l’univers vidéo club à l’ancienne tenu par les geeks de la grande époque, des personnages qui traversent leur vie comme des zombies (la serveuse encore plus que les autres), et l’impression d’étouffer omniprésente.


Le tout ne s’embarrasse pas de bavardages, et quand les dialogues sont là, ils sont bons.
Quelques fulgurances, des moments drôles, et déjà à l’époque une maîtrise du visuel bluffante chez Monsieur Winding Refn.


Chaque décor est soigné, les couleurs sont importantes: appartement au couloir exigu rouge sang, boîte de nuit rouge, et le reste du temps, des murs aux couleurs froides - déshumanisées.
Même soucis pour les vêtements des personnages: dans l’appartement Louise est souvent vêtue dans des couleurs assorties à son espace alors que Léo est en décalage.
Quand Louise se rend à la laverie, on ne voit d’elle que son haut jaune vif qui tranche avec la famille du bonheur qui joue dans les tons bleus et jeans.
Elle s’approche est c’est une fois qu’elle a noué le contact qu’on a une vision globale et que son jean’s vient l’inclure dans le tableau.
Venant de Refn j’ai du mal à penser que ce n’est pas volontaire, des éléments qui rendent son cinéma tellement travaillé et intéressant..
Le soin de l’image, de la façon de filmer, de découper l’espace, d’y inclure les personnages, rien n’est fait par hasard et on imagine qu’on pourrait disséquer la plupart des plans et toujours trouver des choses à en dire.


Malheureusement comme souvent avec lui le message se noie, des situations de pertes de repère qu’on pourrait comprendre prennent des proportions invraisemblables, la violence déferle, et le film devient noir.
Le bon Nicolas semble toujours vouloir abîmer ou montrer que le monde nous abîme et nous façonne.
Je veux bien l’entendre mais je n’aime pas sa manière de le dire.
C’est comme si la beauté et le soin apportés au film étaient noyés dans l’aspect désabusé du tout, et qu’il prenait un malin plaisir à venir saccager l’écran qui avait pu nous éblouir quelques minutes plus tôt.


Du coup je ressors de ce film comme des autres: partagée entre l’intérêt suscité par la majeure partie du métrage et le dégoût des dernières scènes qui me rendent l’expérience rétrospectivement moins agréable que pendant le visionnage.

iori
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le 16 nov. 2016

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