Boîte Noire pourrait en apparence sentir la pâle copie du Chant du Loup tant il semble en reprendre les éléments principaux : un jeune acteur en vogue - ici Pierre Niney, là François Civil -, une ambition scénaristique remarquable en France, une focalisation sur une machine aussi impressionnante que terrifiante - ici l'avion, là bas le sous-marin nucléaire -, la description d'un métier "d'oreille" peu connu, ...
C'est pourtant bien du côté d' Un Homme Idéal, le (deuxième) film remarqué de Yann Gozlan qu'il faut trouver des points de concordance, le réalisateur rappelant son acteur fétiche et le plongeant à nouveau dans une spirale paranoïaque.
A ce niveau-là, le film est une grande réussite. Le sentiment de stress créé par certaines séquences (notamment l'exceptionnel plan séquence en travelling arrière qui lui sert d'ouverture) est réel, le rythme est parfaitement mené, tenant sa longueur sans baisse de tempo (2h10 tout de même), et ce grâce au travail sonore (heureusement réussi) qui plonge son spectateur dans une ambiance étouffante, le tout aidé par le sens habile et maîtrisé de l'image de Gozlan qui rappelle même parfois David Fincher (rien que ça) dans sa froideur, sa rigueur, ses gros plans et cette sensation d'une caméra omnisciente, survolant des scènes autant que s'infiltrant partout, même dans le plus petit (on pense parfois à Panic Room).
Malheureusement dans sa dernière partie le film se prend lui-même à son inventivité scénaristique et à son propre jeu paranoïaque et s'enlise en virant vers un complot d'une trop grande ampleur, pour s'égarer alors dans les multiples pistes qu'il a dressées çà et là, en oubliant certaines qui passeront à la trappe (et resteront donc scénaristiquement de trop). Son spectateur est donc un peu de côté dans une résolution exagérée, peu réaliste, qui pourrait, dans ses énigmes tirées par les cheveux, rappeler presque une aventure de Benjamin Gates (non sans le plaisir que cette chasse peut procurer). Boîte Noire perd alors soudain toute la crédibilité qui le caractérisait et qui attrapait l'attention de son spectateur.
Malheureusement, sans cette confiance extrême d'un réalisateur en son histoire et son propre talent, le film aurait été jusqu'au bout un délicieux thriller machiavélique, dont on aura malgré tout grandement aimé se perdre et se prendre au jeu.