OZU dissèque en entomologiste trois familles de voisins de la banlieue de Tokyo.
L'univers de ce film est très proche de celui de Jacques TATI. Comme chez Tati, une ritournelle de foire (humoristique) souligne le comique des situations. L'importance des bruits et des sons, le cadrage de nombreux plans évoquent Tati. Et les gags abondent : concours de pets entre écoliers, situation délicate du perdant, duo comique des frères, scènes savoureuses avec la grand-mère, etc.
Le cinéaste se délecte à analyser le commérage des femmes, dont la subtilité frôle le sublime quand l'argent est en jeu (le chèque des cotisations à une association a disparu). Maître OZU filme dans les moindres détails le concours de pets qu'une préparation raffinée perfectionne. Il use la métaphore jusqu'à la trame avec une logique scatologique de carabin. Les maris jouent leur rôle d'hommes plein d'autorité (mais à la conviction vacillante). L'alcool au bar du coin leur tire aisément des plaintes, des regrets voire des larmes...
Le personnage central du film n'est ni Minoru, ni Isamu (les frères grévistes pétomanes) mais la grand-mère de la famille Haraguchi. C'est de loin la plus intéressante. Comme Ozu lui-même, la grand-mère regarde sa famille et les voisins avec une distance amusée. Sa peur de la mort lui fait multiplier les prières... et oublier de remettre un chèque à sa fille (l'argent lui semble secondaire). Présidente de l'association, sa fille se répand en excuses mielleuses auprès de la trésorière (mère de Minoru et Isamu).
La grand-mère juge lucidement sa fille ("Et dire que c'est moi qui l'ai mise au monde !"), son petit-fils (un morveux inconsistant) et les autres membres de son quartier. Sa fille, effrayée par un colporteur, demande son aide. La grand-mère n'en fait qu'une bouchée, avec une intelligence diabolique.
Derrière la caméra, OZU sourit aux anges...
Exaspérés de ne pas avoir de télévision, les deux frères se font grévistes. Leur grève de la faim échoue piteusement. L'aîné prétend que les adultes parlent pour ne rien dire, ils entament donc une grève de la parole !
Le titre "Good morning" fait allusion aux phrases échangées par les adultes, assez creuses, mais qui aident à entrer en relation. Elles évitent d'abord les sujets importants mais difficiles, comme l'amour (idylle de la jeune tante et du professeur d'anglais).