Derrière ce film, une compagnie de théâtre, L’Avantage du doute, qui par son nom ne cache guère ses philosopheux (Judith Davis, Maxence Tual), ce qui n’exclut ni les purs littéreux (Claire Dumas), ni les vrais théâtreux (Nadir Legrand). Ce compagnonnage, née de la compagnie de théâtre avec le début de ce siècle, en 2003, donne sa substance à un des éléments les plus convaincants du film, les vies de famille, de couple, d’amitié et de travail, et tout l’éventail des rôles qui ne se trouvent pas sur les planches.
Pour le reste, le film a voulu étendre le domaine de la folie du monde aux mondes alternatifs qui fleurissent un peu partout, notamment dans l’ombre des bâtiments abandonnés, des terrains vagues et des forêts désertées, qualifiés de squats, zones à défendre ou tiers-lieux, comme en l’espèce, avec un nom, HP, soi-disant Hospitalité Permanente mais qui rappelle constamment l’hôpital psychiatrique, et rapproche d’ailleurs hôpital et hospitalité, avec cette thèse manichéenne que le monde est fou et malade, et que les fous sont sages et plutôt bien portants (des œuvres et des artistes d’art brut sont d’ailleurs au générique). De même, le scénario est plutôt basique, avec cet agent immobilier ambitieux qui va découvrir les charmes et vertus des pseudo-sciences, du néo-paganisme, de la médecine douce et des ateliers de libération de la paroles. Dans cet aspect, le film, oscillant entre critique et défense de ces pratiques à la mode, évite de prendre définitivement parti et n’arrive jamais à faire aussi rire que Problemos (les ZAD), La Meilleure Version de moi-même (le gloubi-boulga du développement personnel), Une Année difficile (un certain milieu gauchisant). Les intellos n’ont pas réussi totalement à libérer le clown qui était en eux (sauf, notablement, Claire Dumas avec son alter-égo fantasmatique et androgyne, femme au blouson de cuir, à la voix et au slip d’homme avec garniture), il aurait peut-être fallu tenter Le Splendid à la ZAD.
Par contre, heureuse idée : la distribution au spectateur d’un petit carnet-souvenir, avec photos et œuvres du film, et un peu d’espace pour quelques notes.