Réalisateur aujourd'hui oublié, Henri Decoin connut pourtant son heure de gloire à une époque, et reste reconnu par les initiés comme un honnête artisan du cinéma hexagonal pré-Nouvelle Vague, estampillé "qualité française", l'homme signant près de 50 longs-métrages au cours de sa longue carrière.
Aucun chef d'œuvre majeur au sein de cette filmographie imposante, mais un certain nombre de vrais bons films, à l'image de "Bonnes à tuer", œuvre située à la frontière du film noir, du drame sentimental et du récit d'apprentissage.
Michel Auclair campe un héros extrêmement ambitieux et dénué de morale, entouré des quatre femmes de sa vie à l'occasion d'un dîner dans son nouvel appartement, au cours duquel quelqu'un sera amené à chuter mortellement du haut de la terrasse qui surplombe Paris. Le mystère repose ici dans l'identité de la victime.
Le casting féminin est dominé par Danielle Darrieux, ex-épouse du réalisateur, hélas affublée d'une coupe de cheveux type "mèmère" qui ne met guère en valeur sa beauté. Autour de la vedette Darrieux, des comédiennes d'un standing moindre, telles que la française Corinne Calvet ou l'italienne Lyla Rocco.
On aura beau le regretter, "Bonnes à tuer" comporte indéniablement quelques maladresses, à la fois au niveau du scénario, du montage ou encore de la mise en scène, ce qui de fait limite forcément l'impact et l'envergure de l'ensemble.
Toutefois, le film d'Henri Decoin se distingue par un parti-pris audacieux, choisissant de mettre en avant des protagonistes fort peu aimables, affublés respectivement de mesquinerie, de lâcheté, de bêtise, d'ingratitude, ou encore de machiavélisme.
Ce regard cynique et sans concession posé par le cinéaste permet à "Bonnes à tuer" de se distinguer nettement du tout-venant, et d'offrir un spectacle à la fois plaisant et loin d'être consensuel en cette première moitié des années 50.