Border a obtenu le prix Un certain regard au dernier Festival de Cannes. L'intitulé de la récompense va comme un gant à ce film suédois réalisé par l'iranien d'origine, Ali Abbasi. Ce n'est pas tous les jours que l'on découvre un tel long-métrage, situé entre le conte de fées, le fantastique, la légende nordique et le thriller. Et même comédie romantique par certains côtés. Un film atypique qui fait réfléchir aux notions de beauté, de normalité et d'animalité, toutes sérieusement ébranlées pendant pendant plus 100 minutes. Le point d'orgue de Border est la rencontre entre les deux personnages principaux, celle de la bête et la bête, si l'on veut, qui se reniflent, au sens littéral du terme, avant de s'apprivoiser. Une scène autant grotesque que touchante et qui suscite comme réaction un rire franc et massif, de protection peut-être. Mais ce n'est que le début d'une histoire qui va prendre un tour plutôt bizarre. Dans le même temps, une intrigue se noue autour d'une affaire de pédophilie, assez glauque, et même si celle-ci se rattache ensuite au récit central, elle convainc beaucoup moins de son intérêt et dessert nettement le film. En revanche, toutes les moments situés en pleine nature, parfois au contact des animaux, séduisent par leur caractère élégiaque. Avec l'interprétation hors normes d'Eva Melander, Border a le grand mérite de sortir des sentiers battus et d'assumer sa différence, capable de provoquer des sentiments aussi éloignés que l'émotion et le dégoût. Un certain regard sur l'humain, c'est bien de cela qu'il s'agit.