Entrer dans la prison de Borgo, c'est s'enfoncer dans un monde étrange, une réalité carcérale quasi parallèle à celle du reste de la France.
Comme son concept de prison ouverte, déstabilisant et renversant presque les rôles entre surveillants et détenus.
Cette prison est donc à l'image de l'île, avec ses propres règles et ses propres codes. Un pays où il faut se faire accepter et dont on ne sera jamais réellement l'enfant.
C'est ce double rapport que dessine Stéphane Demoustier, en s'intéressant à un motif de fait divers pour mieux tricoter le quotidien d'une matonne en quête d'un nouveau départ.
Un double rapport que l'on retrouve aussi dans la mise en cène adoptée, qui met en parallèle une enquête sur un double assassinat et le vie dans et hors les murs, de plus en plus en plus poreux. Ou encore cette confrontation entre les images prises sur le vif et celles de caméra de surveillance froides et purement factuelles mais parcellaires.
Borgo est le portrait d'un pays et d'une institution, mais aussi celui d'une femme qui fascine à l'évidence le réalisateur, dans cet instant de bascule de sa vie, dans les conséquences dévastatrices d'un seul doigt pris dans un engrenage en forme de piège.
Cet engrenage, c'est celui d'une mafia qui ne sera jamais décrite frontalement et qui sort de la plupart des codes cinématographique et de la mythologie. La mafia de Borgo, c'est plus une nébuleuse dont on devine l'entreprise partout, enfermant peu à peu Mélissa et d'autant plus redoutable qu'elle adopte les traits d'un gamin sympathique au visage d'ange.
De fait, ces deux personnages-là sont représentés comme pris par un système ou chacun doit rendre des comptes et porte une certaine forme d'ambivalence incarnée par le joli visage fermé de Hafsia Herzi.
Une ambivalence portant un sens du suspens à mèche lente, une montée en puissance sans esbroufe rejetant la violence et les clichés liés à l'Île de Beauté au second plan d'une intrigue en forme de mécanique de l'ombre implacable.
Behind_the_Mask, adepte du tango corse.