Joe Gillis, un petit scribouillard d'Hollywood, ne parvient plus à vendre ses scripts. Endetté, il se retrouve poursuivit par des huissiers qui voient dans sa voiture une possible créance. Joe parvient à les semer sur Sunset Boulevard et s’abrite, suite à une crevaison, dans un garage qui semble abandonné. Se baladant aux abords de la vaste demeure, il va se faire héler par la propriétaire, qui n’est autre que Norma Desmond, une ancienne gloire du cinéma muet. Norma souhaite renouer avec le cinéma et a écrit un scénario complet sur Salomé, une princesse du premier siècle qui porte l’image de prédatrice sensuelle. Joe va donc l’aider à retravailler le scénario, moyennant une contrepartie financière, et devient petit à petit une sorte de gigolo. Prisonnier de cette cage dorée, Joe ne pourra assouvir son amour pour la belle Betty, mais finira par se délivrer de ses chaînes.


La prestation de Gloria Swanson, qui joue Norma Desmond, est peut-être la plus belle et la plus impressionnante interprétation du cinéma. La folie, la détresse, la tristesse, la colère et tant d’autres expressions apparaissent sur le visage de Norma avec une facilité déconcertante dans un rôle très théâtrale. Ancienne gloire du cinéma muet, Gloria Swanson est à bien des égards Norma Desmond. La carrière de l’actrice ne survécut pas à la mort du muet et Boulevard du crépuscule fut son seul film marquant dans le cinéma parlant. D’ailleurs, les dizaines de photos qui ornent la maison de Norma sont celles de l’actrice prises lors de sa carrière et le film que Norma se passe en boucle est La Reine Kelly, où Gloria joue la reine et qui fût réalisé en 1924 par Erich von Stroheim. Le même Erich von Stroheim interprète le majordome Max dans Boulevard du crépuscule.


La dernière apparition de Norma Desmond dans ce film est remarquable et conclut en apothéose le jeu de ce personnage rongé par la folie. Une autre scène est particulièrement belle et touchante. Peut-être la seule où Norma se montre enfin sous un visage détendu, paisible. Il s’agit du moment où l’actrice retourne au studio Paramount après vingt ans d’absence et, assise dans le fauteuil du réalisateur DeMille, est reconnue par les personnes du studio. Figurants, cadreurs, opérateurs, accessoiristes, maquilleurs et tant d’autres petites mains des studios sont heureux de revoir l’ancienne vedette et la pressent de toute part pour l’embrasser et lui glisser des mots doux. Un beau moment auquel l’actrice s’agrippe tel une bouée de sauvetage, mais qui ne la sauvera pas du naufrage annoncé.


Film noir écrit et réalisé de main de maître par Billy Wilder, Boulevard du crépuscule est un chef d’œuvre cassant le mythe d’Hollywood et qui contraste fortement avec l’avènement, quelques années plus tard, des comédies musicales beaucoup plus frivoles.

Créée

le 13 mars 2016

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Vincent-Ruozzi

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