Qu’est-ce que Boyhood ? C’est un long-métrage filmé sur douze ans avec les mêmes acteurs qui retrace la vie de Mason de ses 6 ans à ses 18 ans. Le côté expérimental qui, ma foi, ne garantissait pas la qualité du film a eu le mérite de grandement m’intriguer ! Si dans le synopsis on ne nous en dit pas plus c’est que finalement il ne s’y passera rien de plus que l’histoire de Mason grandissant dans les années 2000 et 2010.
Certaines personnes ne saisissent pas l’engouement qu’on porte à ce film (sa moyenne est de 7,4/10 à l’heure actuelle) et dans une certaine mesure, je peux les comprendre. On pourrait trouver Boyhood gentillet, réussi dans l’ensemble mais pas transcendant, car il ne raconte rien d’autre que la vie banale d'un jeune garçon.
Pourquoi ne pas partager cet avis ? Parce que Boyhood, il faut le trouver humain. Il n’y avait ni scénario ni dialogues établis à l’avance, ce qui les rend réels. J’y ai vu mon enfance et mon adolescence, ou celles de mes amis. Ce n’est pas un hasard, j’ai exactement le même âge que l’acteur principal, et de l’autre bout de l’Atlantique, il a grandi avec moi.
Boyhood est transcendant d’authenticité, d’exactitude. Il parle de notre génération ; celle des parents divorcés, celle qui a acclamé Harry Potter, celle de l’élection de Barack Obama, celle de Facebook. Je ne savais même pas que c’était possible d’aborder tous ces thèmes sans tomber dans les clichés. Boyhood est juste et efficace, et plus qu’une histoire, c’est un documentaire.
On le remarque avec la musique par exemple, choisie avec franchise qu’elle soit de qualité ou pas (surtout pas) ; on chante Britney Spears, on voit Lady Gaga, on entend « Somebody that I used to know » de Gotye dans un bar comme on l’aurait pu nous-mêmes la même année. Et l’apothéose quand Mason reçoit un album des membres des Beatles conçu par son père lui-même... Bon Dieu, qui de notre âge n’a pas reçu un album des Beatles par un adulte espérant qu’on s’en prenne de passion ?
Egalement, une mention spéciale pour les deux cours de psychologie qu’on a vu être enseignés : l’un sur le conditionnement de Pavlov et l’autre sur l’attachement de Bowlby... On les aborde à peine quelques minutes mais ils sont enseignés avec une exactitude qui m’a marquée, parce que les allégories m’ont parlée et que j’aurais sûrement aimé qu’on me l’explique comme ça.
Etincelant encore de réalité même dans le sourire de sa petite copine, le même sourire si droit que toutes mes correspondantes américaines ont eu après cinq ans d’appareil dentaire.
Il me serait impossible de ne le trouver que gentillet car Boyhood, et sans prendre la voix du pathos, c’est moi, c’est un peu la trace de mon histoire, c’est un peu un hommage à celles de mes copains et une bribe du combat de nos parents... Du cinéma très spécial.