On pourrait presque dire que c'est facile de faire des bons (voire très bons) films après avoir vu ce Linklater. Bien sûr, son oeuvre (qui a nécessité 12 ans de production), malgré la sobriété de son propos, reste simple mais n'est pas à considérer comme un film facile. En effet, ce que Linklater arrive à atteindre via son épopée familiale représente quelque chose que beaucoup ne font souvent qu'effleurer : l'honnêteté.
Boyhood parle de l'évolution lente d'une famille (tout de même centré sur le garçon joué par Ella Coltrane) et réussit à toucher ce qui rend cette dernière crédible. L'absence d'un quelconque enjeu scénaristique est rafraîchissante car permet de s'évader du schéma nécessitant un bouleversement ou plusieurs afin de "lancer" un film. Et c'est justement en observant tout simplement cette famille créée par Linklater (mais tout de même à moitié réelle du fait de la longueur du tournage) que le film parvient à peu à peu s'immiscer dans le spectateur : bien que durant 2h45, le temps passe en effet très rapidement du fait de l'attachement rapide aux personnages, car ceux-ci sont dénués de toute hypocrisie liée à une écriture factice.
C'est cet attachement aux personnages qui est justement au centre du film : comment ne pas se retrouver en ce jeune enfant plutôt perdu parmi la masse, cette mère de famille désespérément à la recherche de stabilité pour ses enfants et d'un sens à sa vie, ce père lâche mais tout de même très aimant... Bien que l'on ait pu retrouver beaucoup de ces aspects dans beaucoup de films dans le passé, Linklater n'a pas l'arrogance d'en faire des gens exceptionnels malgré leur normalité. Ici, leur normalité les rend intéressants, et il n'est pas nécessaire de sortir une quelconque morale douteuse de leurs expériences parfois dures. Non, ce sont des personnes qui passent par des périodes charnières, tout comme chacun de nous, et le fait de devenir un "adulte" ne signifie pas que l'on est plus mature ou plus sûr de soi-même.
Comme Ricky Gervais a dit, personne n'a aucune idée de ce qu'il fait, tout le monde est perdu.