Rien que l'idée de base relève du génie. C'est juste filmer l'impossible, l’inaccessible: la Vie, et le film doit durer 2 h 30 au lieu de 12 années ! Et pourtant, Linklater a réussi. Il a réussi à passer toutes ces années dans son objectif. Il a réussi à les rendre aussi palpitantes que banales. Il a réussi à faire en sorte qu'absolument n'importe quel être humain normalement composé se reconnaisse dans au moins une scène. Il a réussi à faire un hymne à la Vie tout en racontant une qui n'est pas forcément la plus belle qui soit (notamment le défilé d'enfoirés pour beau-pères). Et pour ce pari accompli haut la main, il utilise des personnages très attachants. Le père, interprété par un Ethan Hawke génial, est un véritable modèle pour moi, et il est captivant. La mère aussi force le respect. La sœur, avec sa chiantise finalement rigolote, demeure très intéressante. Bémol par contre pour le personnage principal (?), qui lui n'a pas de véritable charisme (pourtant, il séduit pendant tout le film) et n'a pas vraiment de choses à dire non plus (surtout pendant l' adolescence, où il ne parle vraiment que pour parler de conspirations, vous voyez le genre...). Et dire qu'on vois tous ces personnages grandir sous nos yeux... Les scènes s'enchainent et ne se ressemblent jamais. Constamment, Boyhood se remet en question, se réinvente, tout en ne se prenant pas la tête non plus, jamais il met en avant son concept, pour laisser parler l'histoire. Les consoles de jeux vidéos qui évoluent, les évènements culturels et politiques, le rôle de la musique (j'étais tout content d'entendre "wish you were here" de Pink Floyd dans ce film), tout ça passe comme des décors à leurs aventures émotionnellement bouleversantes. Et on se laisse emporter par ce petit nuage de rêve, avec ces gens qui deviennent nos potes, et on les contemple vivre. Littéralement, ils racontent leur vie, comme une secrétaire à une copine, sauf que là, ils savent raconter. Alors certes, l’américanisme pèse lourd des fois (ex. les exercices de tirs au fusil) et vers la fin, cela parait un peu longuet. Mais il y a toujours un personnage secondaire pour retrouver le rythme (certains vus il y a trois quarts d'heure reviennent, dans une situation stable alors qu'on les avais vus dans la merde auparavant !). "Boyhood" est un véritable miracle du cinéma.