« Je m’appelle Charles Bronson, et toute ma vie j’ai voulu être célèbre. Je savais que j’avais un destin. J’avais une vocation. Le truc c’est que je savais pas laquelle. C’était pas chanteur, comme acteur je suis à chier, du coup il restait pas grand-chose, pas vrai ? »
Tout de suite très graphique : lumière rouge, symétrie et grilles.
Tout de suite très violent : coups et sang.
« 1974. Sale temps pour les jeunes en Angleterre. »
Enfant banal, Michael Peterson, plutôt bon élève, est très vite fasciné par la violence, une violence extrême. Malgré une éducation normale, petit boulot et petite amie, il finit par rejoindre la prison après le minable braquage d’un bureau de poste.
Pas grave,
la prison c’est son univers.
Si le scénario de Bronson, spectaculaire biopic du prisonnier le plus dangereux d’Angleterre, semble léger, c’est qu’il permet à Nicolas Winding Refn de se concentrer sur l’essentiel, à savoir ce que nous raconte l’enfermement et la persévérance apparemment imbécile avec laquelle Michael Peterson, devenu Charles Bronson pour la gloriole, s’obstine à suivre sa voie de violence. L’homme semble asocial, incapable de réellement échanger avec les mots. Ses poings serrés sont tout ce qu’il partage naturellement.
Tom Hardy impressionne. Muscles et sourires, voix et regards. Le numéro qu’il interprète sur les deux plans du film (narration et action), est une prestation pleine, entière. Entre baston et grande gueule, entre absurdes revendications pièges et apaisement dans l’art, le comédien tient une bonne partie du film.
L’autre c’est
l’art formel de Nicolas Winding Refn.
Cette séquence autour de la caméra dans l’exiguïté de la cellule, une plongée sur des poings serrés, les montages de couloirs comme un labyrinthe, les touches de sang, les portes qui se ferment, la séquence racontée devant des images d’archives. La scène entre ombre et lumières sur laquelle Bronson met sa vie en spectacle. Les monochromes, bleus, rouges, oranges, les surexpositions. La musique électro, rapide, pour habiter les réflexions, classique, lente d’envols lyriques pour soutenir la violence. Nicolas Winding Refn est un orfèvre du cinématographe. Un homme qui compte la durée de ses plans, qui millimètre le mouvement. Dans ce cinéma très formel et graphique à plaisir, pas d’emportement, pas plus de sang que nécessaire, pas de mouvement dans tous les sens façon clip. Au contraire, des plans fixes pour enfermer, des mouvements lents pour dire l’indécision, l’envie de stabilité du personnage.
Entre l’ombre et la lumière, il s’agit pour l’homme de trouver la part de soi qui reste libre.
Mais quelle liberté dans le regard des autres, et sous la pression sociale ?
Bronson raconte la violence quand c’est tout ce qui reste à l’indécis.
Tout ce qui reste pour faire sens, se sentir vivant et libre.
Un coup de poing dans la vie.
Matthieu Marsan-Bacheré