Chez Blier, la vie a la même signification que la mort. L'amour tient plus au désir sexuel qu'aux sentiments, qui se révèlent finalement gadgets. Quant aux problèmes sociaux, la pesante solitude et l'absence totale de l'argent réduit quasi tout le monde à la clandestinité intérieure. Vous avez dit glauque ? Et pourtant, il en ressort des personnages irrésistibles, des histoires complètement imprévisibles,e t surtout une véritable plage de grains de sels, uniques. Ça c'est Blier. Capable de bof ("Tenue de soirée"), comme de génie (le livre "Beau-Père" ou "les Valseuses"). Et pour "Buffet Froid", il s'est lâché et dresse un véritable portrait de son univers, avec un regard affectueux et plein de compassion pour cette population malade d'un désespoir incurable. Vous avez dit sinistre ? Il n'empêche qu'avec ce long métrage, on ne s'ennuie jamais. Il n'y a presque aucune longueur, ce qui est quand même rarissime dans un film. Il parvient toujours à nous surprendre, à gratter là où c'est le plus intime, et surtout à faire intervenir quelque chose auquel on ne s'attendait absolument pas. Et pour porter cet hymne à l'absurdité pure, un trio de Professionels: Depardieu, Blier (le père), Carmet. Autant ennemis qu'amis, à la colle sans raison, tous les trois aussi timbrés, leur énergie et leur amour pour les dialogues géniaux de Blier se fait ressentir et embarquent. Vous avez dit banco ?
Ce serait beau si il y avait encore des films français comme ça aujourd'hui... mais ce serait impossible à financer, sauf si on s’appelle Quentin Dupieux. Un grand moment de délire.