Quand on voit ce film en avant première en présence de Virginie Despentes dans une salle remplie de lesbiennes en tous genres (il y en avait même une qui ressemblait à Pedro Almodovar) et d'une cohorte de fans avec des livres sous le bras, il est difficile de ne pas se laisser emporter par l'enthousiasme général. Si on ajoute à ça le présentateur du festival Rebelle/Rebel qui se plante toutes les vingt secondes dans son speech, provoquant l'hilarité générale et deux-trois vannes bien senties de la part de la réalisatrice, on obtient une agréable ambiance de fête de village.
Pourtant le film commence très mal. Déjà parce qu'il faut dix bonnes minutes pour s'habituer aux gros plans sur les deux plus grandes bouches du cinéma français. Mais surtout parce que toute la partie dans les années 80 sonne terriblement faux jusqu'à ce que justement on se rende compte que ça se passe dans les années 80. Dès que le rapport entre les deux gamines et le duo Béart/Dalle est éclaircie, le film prend une toute autre dimension et se laisse regarder sans encombres.
On n'échappe pas à quelques clichés sur les lesbiennes, sur les écrivains, sur les hopitaux psychiatriques, sur le monde de la télévision ou sur les parisiens et les provinciaux mais c'est fait en toute innocence car Despentes n'a aucunement l'intention de faire un film réaliste sur ces sujets. A la place, elle nous raconte une histoire d'amour légère, pas sulfureuse pour un sou et souvent drôle, loin de tout le militantisme LGBT que l'on aurait pu craindre.
L'affrontement idéologique punk/skin est quand à lui foutrement bien traité et donne l'occasion à Despentes de se lâcher dans la réalisation. Avec Le Grand Soir qui sort dans quelques mois, le punk français est hype pour mon plus grand bonheur. Cela donne l'occasion de sortir toutes une tripotée de bonnes chansons d'époques, d'inviter Lydia Lunch à faire coucou (alors qu'elle truste déjà une bonne partie de la BO) et de faire délivrer à Soko une version acapella et éméchée de Babylon's Burning. Une bande originale qui devrait s'arracher comme des petits pains.Clairement le point fort du film.
L'alchimie des actrices y est évidemment pour beaucoup. Les deux gamines Soko et Clara Ponsot surpassent sans efforts leurs ainées dans la grâce et le charisme, même s'il est quasiment jubilatoire de voir Béatrice Dalle dans le rôle de la camionneuse pas aimable qui lui va comme un gant. Béart s'en sort pas trop mal surtout parce qu'elle a moins de possibilités de partir en roue libre que sa consœur. Les seconds rôles masculins ne sont pas en reste avec un Greggory parfait dans l'écrivain en panne et Stomy Bugsy (qui s'appelle maintenant Gilles Duarte) en chauffeur/lover qui mériterait son propre spin-off.
On y croit, on rit et même si l'on échappe à quelques petites maladresses dans l'écriture et l'interprétation, on est un bien content que ce soit pas "le film coup de poing de toute une génération" même s'il va bien y avoir un crétin pour le sortir.
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