Une chose que j'aime avec le cinéma nippon, c'est qu'il ne se sent pas obligé de créer artificiellement du conflit, de l'antagonisme, de transformer en véritable Troisième Guerre mondiale le plus petit désaccord là où ça n'a pas lieu d'être. Ben oui, parfois filmer la vie telle qu'elle s'écoule, voir des gens qui s'apprécient, qui essayent de régler avec un minimum de maturité le moindre problème relationnel, ça suffit.
Si j'écris cette introduction dans cette critique du film Netflix Call Me Chihiro (qui est l'adaptation d'un manga, que je n'ai point lu, n'ayant absolument rien à voir avec Miyazaki !), c'est qu'ici, on est en plein dans ça. Et c'est tant mieux.
Bref, on suit une ancienne travailleuse du sexe, ne s'en cachant nullement, qui vend des bentos (on voit souvent les personnages manger, donc, attention, lors du visionnage, on a des envies de bouffer japonais ; d'ailleurs, il est à préciser que la nourriture dans ce film est révélatrice des personnalités et des environnements personnels de chacun !) dans une petite ville côtière. Son humeur d'apparence constamment positive et son souci de vouloir apporter du bonheur à des âmes esseulées rythment son quotidien.
A travers ce genre d'histoire, on n'est pas du tout dans une suite d'événements savamment agencée, menée sur un rythme soutenu, mais dans un récit guidé (si on peut le dire ainsi !) par les divers protagonistes et leurs interactions. En résumé, c'est un film de caractères. Si la première partie se centre sur un être qui essaye de rendre l'existence des autres meilleure, la seconde (sans pour autant occulter les conséquences positives que ses actes apportent à celles et ceux qui ont la chance de la croiser !), se concentre surtout sur l'héroïne (incarnée par une rayonnante Kasumi Arimura !), sur son passé que l'on devine traumatique, et qui comprend, par le biais d'un sentiment persistant de solitude (tout en n'essayant pas de faire croire que cela passe forcément par la nécessité de se mettre en couple !), qu'apporter le bonheur aux autres, c'est formidable, mais qu'il est essentiel aussi qu'elle soit elle-même heureuse.
Alors, vous l'aurez deviné, si vous ne vivez que pour les mécaniques scénaristiques, avec un minimum de bruit et de fureur, ce film n'est clairement pas pour vous (ce qui n'est pas un reproche, juste des goûts et des couleurs !). Par contre, pour celles et ceux qui consentent à prendre leur temps, à s'apaiser, à se laisser aller à la méditation, à un rythme plus proche de la vie, le tout couvert d'une douce couche d'humanité, je pense que vous ne pouvez que kiffer.