C'est clair que ce film donne envie de gerber. Mais pas pour les meurtres d'animaux (tous les internautes non-végétariens n'ont rien à dire), ni pour la violence des actes, mais à cause d'un manque de point de vue et du mépris du réalisateur qui est communiqué tout au long du film.
D'un côté il met en scène des journalistes blancs vaguement antipathiques et transparents et de l'autre il montre un mépris sans borne et une description arriérée, presque coloniale, d'indigènes déshumanisés et désincarnés. Quant aux paysages de la jungle amazonienne qui pourraient être mis à profit pour installer une ambiance, ils sont ternes et mal exploités.
Le problème du film ne vient du fait qu'on ait fait courir le bruit qu'il s'agissait d'un documentaire avec des mises à morts réelles (coup de com' caractéristique des films d'exploitation), ni du fait que Deodato ait justifié son film d'une manière absolument ridicule (une dénonciation de la violence des médias, paraît-il), mais qu'il n'adopte aucun point de vue, or le cinéma d'horreur est affaire de point de vue. Point de vue de celui qui voit, de celui qui souffre, à travers lequel on croit à un personnage, à une réalité que l'horreur perturbe.
Il y a des films traumatisants qui éveillent l'intérêt pour leur pouvoir cathartique qui contribue à canaliser et évacuer les peurs collectives plutôt que de les nourrir de façon artificielle (La dernière maison sur la gauche, A l'intérieur). Il y a des films de survie qui mettent en scène avec brio la dégénérescence et l'anomie sociale (The Devil's Rejects). Il y a des films d'ensauvagement qui humanise les personnages avant de les charcuter (Massacre à la tronçonneuse, The Descent). Et puis il y a des films dits d'exploitation qui n'exploitent que le spectateur.