On l'appelle Centaure, cet ancien projectionniste qui semble un peu marginal dans la société kirghize. Le sixième film de Aktan Arym Kubat (aussi connu sous le nom d'Abdykalykov) est une fable sur un pays d'Asie centrale en pleine mutation. Dérives capitalistes et montée de l'intégrisme ont tendance à gommer les traditions ancestrales d'une terre dont les habitants ont de tous temps été reconnus pour leur orgueil et leur bravoure. Et pour leur amour immodéré pour les chevaux, considérés comme "les ailes des hommes." Le réalisateur du Voleur de lumière, également acteur principal de Centaure, n'est heureusement pas un didacticien mais un vrai cinéaste qui utilise la malice, l'humour et un sens lyrique modéré pour tracer le portrait d'un homme déphasé qui croit en certaines valeurs. Fluide et visuellement superbe, son film n'a rien de passéiste, dans le sens où il ne cherche pas à nier les apports de la modernité, cherchant plutôt, partout où il le peut, une dose d'humanité pour résoudre les conflits. Aktan Arym Kubat est le meilleur représentant du cinéma kirghize, dans une Asie centrale dont on ne voit plus guère, hélas, les films kazakhs ou ouzbeks.