Au vu de mon enthousiasme sans borne pour l'oeuvre que constitue la saga chair de poule (pour les manuscrits essentiellement, sommet de kitscherie et d'épouvante bon marché), l'adaptation en série télé a déjà été vectrice d'impressions mitigées. Entre le ratage complet que constitue la direction d'acteur et les effets nanardeux sensés donner une ambiance cauchemardesque, c'était une redécouverte aussi attachante qu'atterrante, tant certains passages se révélaient à la ramasse question ambiance (pour faire un best of accéléré de la saison 3, cherchez le Parc de l'horreur et Place aux vieux). Mais cette absence de frayeur qui contredisait toutes les promesses se révélait particulièrement attachante pour l'amateur d'horreur nostalgique, qui revoyait ses traumatismes d'enfance se transformer sous ses yeux en nanar de la pire espèce... Alors, dans quelle direction un reboot pouvait bien aller ?


Curieusement, j'ai du mal à dire si c'est un mauvais film ou un bon. Mauvais, car il évacue tout le ridicule nanar de la série (le "attention jeune ami : spectateur sensible s'abstenir !!!" précédant chaque épisode) pour le remplacer par du remplissage de film pour enfant et jeune ado. Un jeune ado qui arrive dans une nouvelle ville avec un déménagement, qui se rapproche d'une mignonne voisine, qui se fait un peu bizuter, qui se retrouve ami avec un nerd de la pire espèce (mais vraiment, l'empoté de service). Difficile de s'attacher à de tels clichés, surtout quand notre auteur favori est remplacé par un Jack Black survolté qui peine un peu à faire oublier cette tronche de prof d'anglais qu'a R. L. Stine (au jeu d'acteur pathétique, qui explique surement son remplacement, mais qui cachetonne lors d'une apparition furtive). La lourdeur de l'humour contribue aussi largement à faire basculer le film du côté du navet. Mais le film est aussi bon car il soigne les effets spéciaux numériques et qu'il tente quelques petits numéros audacieux qui sont rares, voire inexistants dans le style de Stine. Ce dernier rédigeait des histoires très plan plan, avec toujours un deus ex machina, ou un détail qui désamorce une trop grande horreur. Il n'y avait pas de rythme à proprement parler (ce qui rajoutait à la lourdeur du style). Ici, la narration est rythmé, et on peut se souvenir de plusieurs séquences, du numéro de patinage de l'abominable homme des neiges jusqu'à la poursuite effrénée avec la mante religieuse géante, en passant par l'excellent loup garou (qui aboie XD). Chair de poule se conçoit ici comme une série B dynamique qui tient des promesses similaires à La cabane dans les bois, sans évidemment se lâcher question violence. Mais la générosité est là, indéniable.


Le film peut d'ailleurs se vivre comme un best of de la saga, qui ressort ses créatures les plus marquantes (le pantin maléfique, le loup garou, le blob de "sang de monstre"...) et quelques curiosités comme les improbables nains de jardins maléfiques et bien d'autres joyeusetés. Pour compenser la médiocrité initiale de l'horreur, le film joue sur l'accumulation, et use de prétextes bien lourds pour toujours pousser les personnages à la confrontation directe. D'une façon un peu inattendue, le film se permet aussi un petit discours fantastique émotif sur la relation entre un auteur et sa création, qui parvient à susciter un petit tressaillement émotif chez le spectateur (enfin, chez moi, car mes camarades amateurs de chair de poule ont soupiré pendant tout le film devant cet arc thématique). Car ce film, c'est aussi du fan service pour les fans de la saga chair de poule, les vieux comme les jeunes. Le film se veut toujours respectueux de la passion qu'entretiennent les petits amateurs de frissons (c'est faux hein, on n'a jamais peur) pour ce titre vert gluant, et compense son remplissage par autant de petites allusions qui flattent la mémoire, et un état d'esprit général tourné vers l'hommage, avec des moyens suffisants pour qu'on soit enfin impressionné par les effets spéciaux. C'est clair qu'on est partial sur ce coup là, mais les intentions sont honnêtes, malgré une lourdeur assez régulière..

Voracinéphile
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le 22 déc. 2015

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