Comment exprimer ce sentiment de culpabilité à l’égard d’un film qu’on n’a presque pas envie d’aller voir mais qu’on va voir quand même parce que cette figure du « Che », parce que cet acteur qu’est Benicio Del Toro, semblent nous y obliger ? A chaque biopic le même piège : cette impression qu’au moins on ressortira moins ignorant. Au moins ce film surprend agréablement au début. Il nous épargne les traditionnelles enfances et les sempiternels parcours initiatiques. On commence perdu dans la jungle et on finit…perdu dans la jungle. Presque comme s’il s’agissait de rendre hommage à sa doctrine, le célèbre guérillero en est presque anonymé, ce qui n’est pas forcément pour déplaire. Au moins évite-t-on l’hagiographie… Mais pourquoi ce film ? Deux heures dans la jungle… Deux heures de vie précaire, de déménagement, de petites discussions à la sauvette et de quelques traquenards de ci de là. De temps en temps quelques sauts dans le futur, quelques approches du mythe tel qu’il est connu nous sont rappelés par flashs incongrus. Mais à ne pas vouloir prendre parti, à aseptiser le discours de l’homme pour rendre sa démarche plus accessible et universel, Soderbergh est comme un sculpteur qui cherche à façonner sa statue sans oser érafler la roche. Qu’en ressort-il ? Un biopic sans héros, un film sans réel sujet. Et on ose nous faire le coup du film en deux parties alors qu’on a rien à dire pendant plus de deux heures… Finalement le bilan est simple : voila un film peureux qui, effrayé par l’audace d’un tel sujet, a fui en route au grand dam des spectateurs qui se sont osés à la voir. Bref, un coup dans l’eau bien ennuyeux…