La France entière devait connaître la date de sortie de Chocolat, le nouveau film de Roschdy Zem, au vu de la monstrueuse promotion qui a été mise en place par l'équipe du film.
J'avais donc vu une centaine de fois la bande annonce avant qu'il ne sorte enfin.
Le problème avec les films autant annoncés, c'est qu'on en attend énormément (si autant de monde en parle c'est qu'il doit être bien, non ?!) ; et le résultat n'est pas à la hauteur des espérances et surtout de ce qui avait été promis.


Ce n'est globalement pas le cas avec Chocolat et j'ai envie de dire ouf car six mois de promotion pour un rendu moyen, cela m'aurait.... horripilé !


Tout est donc très bien réalisé.


Les décors sont parfaitement réalisés ainsi que les costumes, le spectateur est véritablement plongé au coeur des cirques bohèmes, du Paris bourgeois du XIXème siècle. Rien à dire donc de ce côté. L'image en elle même est très belle, avec cet aspect toujours un peu vignette ancienne et contribue à rentrer parfaitement dans le monde cruel des arts du cirque.


Côté scénario, Roschdy Zem adapte la trop oubliée histoire de Chocolat, au début cannibale et dont la vie est bouleversée par la rencontre de Footit, un clown blanc pour qui le succès n'est plus au rendez-vous. Les deux hommes créent un duo qui allie pour la première fois l'Auguste et le Clown blanc, les deux figures emblématiques du cirque. Le pari est risqué mais un directeur leur donne leur chance dans l'un des lieux les plus populaires de la capitale.
Commence alors une ascension vers un succès somme toute relatif, durant laquelle Chocolat, alias Kananga, prend conscience de sa pitoyable condition, du paradoxe de sa célébrité. Entre frasques liées au jeu et à l'alcool, légèreté de vivre et introspections de son esprit, Kananga est l'exact opposé de Footit, autoritaire, déterminé, tourmenté, vide.
Lui cherche le succès, la reconnaissance artistique tandis que Chocolat est à la recherche de sa liberté, de son humanité.


Le coeur de l'histoire, bien que les histoires parallèles soient également intéressantes repose donc sur la condition de Kananga, de Chocolat et de Rafaël Padilla. Trois personnages, trois vies, trois parcours et pourtant un seul homme. On est d'abord touché par le personnage de Kananga, le cannibale amical d'un petit cirque désuet, dont les conditions de vies sont inférieures à celles des animaux de la troupe mais qui rayonne pourtant de sa joie de vivre, de sa gratitude envers ceux qui, s'ils ne l'ont pas traité comme un prince, lui ont tout de même ouvert la porte. Et puis apparaît Chocolat, qui passe progressivement d' élève indiscipliné à jeune artiste confirmé. Quand finalement, la chrysalide devient enfin papillon et rêve de prendre son envol vers le monde flamboyant du théâtre dramatique, qui lui brûlera pourtant les ailes.
Chaque costume qu'emprunte l'artiste lui permet d'en connaître un peu plus sur l'homme qu'il est, sur sa place dans la société, sur sa condition d'artiste mais surtout de noir au XIXème siècle.
Et le personnage est merveilleusement interprété par Omar Sy, que personne ne pouvait remplacer sur ce rôle.


James Thierrée incarne également totalement son rôle de Georges Foottit. On découvre au départ un personnage plein d'ambition, déterminé à réussir malgré les bâtons qu'on lui met dans les pattes, certain d'avoir trouvé en Kananga la clé du succès. Sa détermination et sa sévérité dans l'entraînement qu'il dispense à ce dernier contraste avec son insouciance. Progressivement, le maître devient le bourreau et la deuxième partie du film illustre à plusieurs reprises les accès de tyrannie dont il est capable. Alors que l'on voyait en lui un homme dur mais juste, le spectateur découvre petit à petit sa jalousie, son narcissisme, son égocentrisme, sa folie : le protégé n'était qu'un appât du succès, qu'il faut contrôler et canaliser.


Finalement, alors que Kananga s'éveille à la vie, à la liberté, Footit perd la sienne. La prise de conscience (avec la scène de l'affiche publicitaire) que Chocolat est en réalité bien plus apprécié que lui révèle ses névroses, ses anciens démons.


En résumé, je dirai donc qu'il s'agit d'un très beau film dont tant le jeu des acteurs que la réalisation a été peaufiné, et ça ce voit. Le thème est classique puisque l'on parle encore de racisme, d'intégration, de condition humaine mais le traitement dans le monde du cirque lui donne un aspect différent qui ne rend pas le propos monotone.
Cela dit, on ne sort pas plus ébahi que cela de la salle de cinéma car après autant de publicité, de promotion, on a envie de se dire Encore heureux !

JustineWind
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le 5 mars 2016

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Justine Wind

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