Qui aurait cru qu’une réplique de Transformers de Michael Bay (2007) conviendrait si bien comme titre de critique pour le septième long-métrage cinéma de John Carpenter ? Sorti en 1983, Christine arrive juste après l’échec The Thing et permet à Carpenter de renouer avec le succès. Poursuivant sa carrière dans le cinéma fantastique et horrifique, le réalisateur nous livre avec Christine une autre œuvre culte qui a su marquer des générations entières de spectateurs.
Arnie Cunningham est un adolescent timide et complexé. Un jour, il fait la rencontre de Christine, une Plymouth Fury de 1958 en piteux état, et décide de l’acheter. Lorsque la voiture retrouve une seconde jeunesse, le comportement d’Arnie commence à changer. Désormais sûr de lui, en couple avec la plus belle fille du lycée, il reste néanmoins obsédé par Christine. Quiconque osera se mettre en travers de leur chemin devra en payer le prix fort.
L’échec de The Thing au début des années 1980 coûta cher à la carrière de John Carpenter. En effet, il s’est d’abord fait éjecter du projet d’adaptation cinématographique du roman Charlie de Stephen King puis s’est vu annuler son contrat avec le studio Universal. Big John poursuivit donc sa carrière dans son coin, loin des grands studios, et accepta la transposition sur grand écran d’une autre histoire du King de l’horreur. On peut dire que l’ombre du célèbre auteur planait depuis longtemps sur la carrière de Carpenter puisque le cinéaste a reconnu que Stephen King fut une véritable inspiration pour la réalisation de ses films. Après Fog qui pouvait faire penser à une histoire sortie de l’esprit de l’écrivain (brouillard, fantômes, épouvante) et son projet avorté autour de Charlie, Carpenter concrétise enfin sa filiation avec l’auteur de Shining et Ça avec l’adaptation de Christine. Élément intéressant, la production du film débuta avant que le roman ne soit publié, le producteur du film Richard Kobritz ayant acquis les droits de Christine auprès de Stephen King avant même que celui-ci n’ai terminé son histoire. Avec son écartement du projet Charlie, John Carpenter accepte donc l’offre de Kobritz de réaliser Christine avec un budget de 10 millions de dollars. Pour lui, il s’agit plus d’un film de commande que d’un projet personnel. Le film sort en 1983 et récolte un joli petit succès critique et commercial avec 21 millions de dollars de recettes aux États-Unis et rassemble plus de 900 000 spectateurs en France en 1984.
Parmi les films les plus cultes de Carpenter, Christine était un de ceux que je n’avais jamais vu. Je connaissais sa réputation d’adaptation réussie d’une œuvre de Stephen King au cinéma, bien qu’il y ait apparemment beaucoup de différences avec le roman, ainsi que son statut culte dans la filmographie de Carpenter. Et je dois bien avouer qu’après l’avoir vu je peux vous confirmer que Christine est un film formidable, qui n’a pas vieillit dans ses effets et qui fonctionne toujours aussi bien de nos jours.
Pendant mon visionnage du film je suis passé par toutes les étapes ! De film sympathique qui ne me transcendait pas comme je le voulais jusqu’à la grosse claque qui me marquera pendant un petit moment ! En effet, j’ai trouvé que le film mettait du temps à démarrer et à nous faire entrer dans son histoire d’adolescents chamboulés par leurs hormones et le sexe, complexés, rêvant de s’éloigner de leur parents, d’acheter leur première voiture,... Le début est assez lent, le film prend son temps pour nous présenter ses personnages, son ambiance et ses enjeux.
Et puis arrive la scène qui fait basculer ce long-métrage dans le fantastique/horreur et qui a également fait basculer mon appréciation générale : une scène de striptease surréaliste d’une voiture des années 1950 devant un adolescent totalement abasourdi par la beauté et le sex-appeal de son véhicule. Cette scène est juste totalement jouissive, transcendée par la musique exceptionnelle de Carpenter (une fois de plus compositeur de génie) et par ses incroyables effets spéciaux qui n’ont pas pris une seule ride ! À ce moment-là, le film m’a totalement emporté dans son histoire et son ambiance avec le « personnage » de Christine qui se transforme en véritable monstre assoiffé de sang, traquant les individus qui ont fait du mal à elle et à son « chéri ». On pense souvent à Duel (1971) ou aux Dents de la Mer (1975) de Steven Spielberg avec cette voiture rouge démoniaque, qui poursuit sans cesse ses victimes, sans s’arrêter, qui ne craint ni le feu ni les obstacles infranchissables pour une voiture. Une véritable machine à tuer qui rugit tel un dragon avec son moteur vrombissant et qui nous terrifie avec ses grands yeux ronds, pourtant de simple feux avants...
Le film de John Carpenter est donc très fort à ce niveau-là, mais celui-ci est encore plus intéressant avec son personnage principal, Arnie, qui change de personnalité suite à son « coup de foudre » avec Christine. Complètement obsédé par sa voiture rouge, le jeune homme sombre petit à petit dans la folie et la violence ; serait-ce une représentation extrême de la crise de l’adolescence ? Le film laissera d’ailleurs planer un certain mystère quant à la présence du personnage dans la voiture pendant les meurtres de ses ennemis. Christine est finalement une histoire d’amour entre un adolescent et une voiture psychopathe totalement obsédée par son conducteur. Le producteur Richard Kobritz voyait en effet dans l’histoire de Stephen King une « célébration de l’obsession de l’Amérique pour les voitures » et on y est clairement dans ce film. Animée de vengeance et de jalousie maladive, Christine est sous le charme d’Arnie, tout comme celui-ci totalement hypnotisée par elle, comme en témoigne la fameuse scène de striptease ou leur scène finale avec cette caresse pleine de sensualité. Et c’est là que le film de Carpenter est aussi très fort : il réussit à nous donner l’impression que la voiture est véritablement vivante et hantée par un esprit démoniaque. La manière dont le réalisateur filme la voiture, souvent avec des plans sur son nez, ses phares ronds tels de grands yeux, contribue à la personnifier.
Christine fut donc une vraie révélation pour moi dans le cadre de ce cycle consacré à la carrière de John Carpenter. Le film est certes un peu long à démarrer mais une fois qu’on embraie (désolé trop tentant) sur sa deuxième partie, il est tout simplement passionnant. Le suspense est très bien maintenu (Carpenter est toujours aussi bon dans ce domaine), les acteurs sont vraiment bons, la musique de Carpenter est géniale tout comme l’utilisation de la chanson Back to the Bone de George Thorogood, la réalisation est très maîtrisée et le film sent bon les 80 ‘s ! Un des meilleurs films de John Carpenter c’est indéniable et un excellent divertissement qui en a encore sous le capot ! (Oui désolé...)