Il y a des idées pour lesquelles il vaut mieux être le premier a les avoir eu. Si je me dis ça en sortant de ce "Chronicle", c'est qu'à voir un nouveau film à effets spéciaux intégralement tourné caméra au poing, comme un faux reportage, je n'ai pu m'empêcher de me dire : « encooore ? » C'est donc presque déçu que j'ai découvert les premières minutes de ce "Chronicle" : ça puait le "Cloverfield" sauce « teen movie » à plein nez, avec ce qui semblait s'annoncer comme étant la pire combinaison de ce qui peut exister entre ces deux genres. D'ailleurs – pas loupé ! – je n'ai pas pu m'empêcher de me marrer intérieurement face à ce premier quart d'heure absolument grotesque. Suis-je le seul à m'en étonner, mais n'y a-t-il pas une grosse incohérence à utiliser le principe du « faux-documentaire » (ça a un nom ce genre maintenant ?) pour filmer des mecs et des nanas recrutés sur catalogue, dans un univers pétri de clichés à mille lieues de toute réalité ??? Non mais la blague quoi ! ...Et pourtant, malgré ce gros boulet au pied, cela n'a pas empêché ces trois ados de décoller dans mon estime (admirez la métaphore filée... Je me permets d'ailleurs de taper le reste de cette critique d'une main pour me caresser égocentriquement le téton de l'autre). Qu'est-ce que j'ai bien pu trouver d'intéressant et de plaisant dans ce spectacle qui semblait pourtant formaté et aseptisé ? Eh bien, à dire vrai - c'est justement le paradoxe - il y a deux choses que j'ai vraiment adorées dans ce film, mais qui pourtant n'ont rien à voir ensemble, et qui d'ailleurs n'avaient à mon sens rien à faire dans le même film. Parce que oui, je trouve que les trois premiers quarts d’heure durant lesquels nos chers gugusses découvrent leurs pouvoirs sont assez séduisants : ce début sait prendre son temps, et parvient aussi merveilleusement à jouer de l'effet intrigant et novateur que créé la combinaison entre film amateur et effets spéciaux. En plus, ce moment sait se faire drôle et pertinent à de nombreux moments. Franchement, j'étais à fond dedans, et bien curieux de voir où ce ton assez particulier pouvait conduire... Et là - blam ! - retournement de situation. La logique du « teen movie blockbusterisé » reprend le dessus sur le dernier tiers. Toutes les promesses de création de personnages s'écroulent pour un schéma beaucoup plus basique de film à sensation. Voilà en tout cas le bilan que je pouvais faire de ce "Chronicle" au bout de mon premier visionnage. Pourquoi je parle de "premier visionnage" ? C'est parce que - oui - je me suis permis de compléter cette critique depuis que j'ai redécouvert ce film il y a peu, quelques mois après sa sortie en salles. En substance, mon point de vue n'a pas vraiment changé, à la seule différence que, sachant où le film allait, j'ai beaucoup mieux saisi l'unicité de la démarche tout comme j'ai pu mieux apprécier la cohérence de l'ensemble. En somme, si j'avais à vous faire un bilan : je vous dirais qu'à la première vision, l'aspect bipartique que j'avais vu du film me faisait lui donner un 4/5 qui me semblait amplement mérité. Mais je ne vous cache pas qu'à la longue, ce film m'a quand même hanté pour certaines scènes purement géniales et pour la remarquable ambiance que ce film a su construire, que ce soit dans son début fun que pour sa fin magnifiquement "akiresque". En le revoyant, je ne lui voyais plus rien à jeter : ne restaient que ses points forts. Plus j'y repense à dire vrai, et plus ça me saute aux yeux. Audace, partis pris esthétiques, scènes notables, et regard très pertinent au fond sur ce qu'est la fin d'adolescence : finalement ce "Chronicle" a absolument tout d'un grand. Alors oui, au risque de surprendre ceux qui ne se sont pas penchés très longtemps sur ce film ou qui n'ont pas voulu y voir autre chose qu'un teen-age movie à sensation, je me permets d'affirmer que ce film est pour moi l'une des grosses claques de cette année 2012. Allez - oserais-je ? - j'irais même jusqu'à dire qu'en fin de compte il a tout d'un chef d’œuvre...