Pendant 4 interminables jours, Churchill a attendu de savoir combien de jeunes citoyens anglais allaient mourir sur les plages de Normandie. Et nous voilà à attendre et attendre avec lui, entre une rencontre avec les militaires et une prise de bec à fleurets mouchetés avec sa femme Clementine. Et à osciller entre les très, très gros plans sur les yeux de bon briard du gros bonhomme et les plans d'ensemble à échelle grandiose dans lesquels des fourmis humaines reprennent la place qui est la leur dans l'univers, ou peut-être l'histoire. Alors, évidemment, attendre n'est pas cinégénique en soi. C'est même passablement casse-pied. En un quart d'heure, on saisit les enjeux historiques et les tensions intimes... après, ça s'étire et ça s'étiole. En fait, on ne le savait pas, mais on attendait un fameux discours du rugissant Churchill, qui tient lieu de point d'orgue de cette histoire. Le Débarquement reste dans la coulisse. Du coup, difficile de sortir très exalté de cette expérience contemplative et parfois grandiloquente. Malgré tout, il faut convenir que les images sont belles, savamment composées, divinement éclairées, et ça n'est pas rien. De là à conseiller ce film, je ne franchirais pas le pas. Churchill y est un peu malmené, en outre : poussé vers la sortie par des généraux plus jeunes que lui, ravalé au rang de subalterne par le Roi ou Eisenhower, bousculé par sa timide petite secrétaire qui n'en peut plus non pas de ses abus d'autorité mais de sa veulerie (une vue de l'esprit, certainement...) et surtout, sévèrement tancé par son indéridable épouse à la moindre occasion, on ne peut pas dire que le grand homme se tire indemne de son évocation... Après, certains dialogues provoquent un sourire entendu par leur sournoiserie typiquement britannique. Et ça, c'est rafraichissant dans un pays où les présidents posent avec des "gangstas" de pacotille... ^^ Au moins les mots et les symboles ont-ils encore un sens dans les productions historiques.