Une guerre civile. Une menace si souvent agitée - et pas pour rien - qu'elle enclenche instantanément l'imagination fut-elle tournée vers le pire. Civil War ne l'a situe pas aux U.S.A par hasard. Le moment est opportun, nous l'admettrons tous à quelques mois du match retour entre un président en exercice et un ex-président qui a déjà tenté le coup d'état (je vous laisse mettre un nom sur chacun d'eux), c'est dire si les lignes de fractures sont creusées. Incidemment, le réalisateur Alex Garland décide d'en faire son sujet...ou pas.
Passons la promotion, la guerre civile n'est pas l'intérêt premier de Garland. Nul contexte, peu d'informations sur les forces en présence. La situation en est là, c'est ainsi. La facture générale est à l'avenant, malgré un budget de 50 millions de dollars. Les séquences guerrières sont tonitruantes grâce à un énorme travail sur le son. Chaque balle provoque une déflagration pour l'ouïe, et le style documentaire opté par Garland rend compte de la cruauté lorsqu'une vie est balayée en une poignée de secondes.
Nous collons aux basques d'un groupe de photojournalistes en partance pour Washington D.C. La question derrière cette intrigue tourne autour du rôle de ses hommes et femmes qui immortalisent l'instant T pour le faire entrer dans l'éternité. Leur motivation, leur éthique dans les situations extrêmes et le sens à donner aux photographies qu'ils ramènent ? Et plus encore, comment évoluent-ils au sein d'une profession qui les propulse aux premières loges devant les pires horreurs ? Des questionnements souvent réitérés à chaque photo choc en temps de conflit ou concernant la crise migratoire ou à un niveau plus philosophique sur l'image elle-même et les mensonges qu'elle peut raconter.
L'écriture ciselée offre un cheminement complet pour les personnages de Lee (Kirsten Dunst, superbe) et Jessie (Cailee Spaeny, parfaite), parties dans une relation mentor/élève convaincante. C'est nettement plus en surface sur le reste, hélas. Rester à distance est un point de vue, mais la nuance est aussi trouble à mon sens que l'est l'évolution du conflit national. Hormis cette fantastique scène de tension pure avec un Jesse Plemmons terrorisant en redneck psychopathe, Civil War montre bien peu de choses du côté des rebelles. L'ambigüité se fraye in fine un chemin lors de son épilogue, en espérant que ce soit volontaire. C'est un peu tard pour traiter enfin du sujet que nous promettait le titre.