Civil War par VKaeru

Il est des films urgents qui apparaissent spontanément pour faire leur travail d'électrochoc. Il est cependant rare qu'ils appartiennent à la catégorie des "blockbusters", Joker faisant exception par son nihilisme et son radicalisme, car trop souvent donnant un produit formaté ne parlant qu'à une partie du public, celui-là même à qui il a envie de parler : ainsi Don't Look Up qui pense convaincre "les méchants" en les représentants comme stupides et obtus. Civil War prend toutes les précautions nécessaires pour ne pas être taxé de film partisan : le camp sécessionniste de l'ouest est constitué du Texas et de la Californie, bastions républicains et démocrates. Il s'agit moins d'une réactualisation de la guerre des valeurs du sud contre le nord qu'une mise en garde concernant la probable destinée (on en est là) d'un pays qui ne s'écoute plus. L'horreur de positions extrêmes est évoquée à travers le charnier des miliciens racistes, mais le film présente moins deux camps que le peuple contre le gouvernement, refusant d'opposer les factions afin de rassembler plutôt que de diviser. Un renversement des valeurs replace la presse au service de la population, dans sa mission première (Reuters a été accusé d'être à la botte de la CIA durant les années 70) : nous ne savons pas exactement comment cela a eu lieu, mais les reporters semblent être considérés positivement par le peuple, peut-être parce qu'ils le sont négativement par le gouvernement. Nous pouvons imaginer que par objectivité journalistique, la presse s'est dressée face à la dérive autoritaire du président, ce qui explique également qu'il les invoque afin de renouer le lien avec l'"extérieur" lorsqu'il sent le vent tourner. Si la presse a le beau rôle (ce qui n'est pas très représentatif de l'actualité, certains médias étant taxé de propagandisme pour un bord politique ou un autre, souvent jusqu'à l'absurde, mais malheureusement parfois de manière fondée, les accointances avec le pouvoir étant nombreuses), en tout cas la presse de reportage tente de garder un œil neutre (comme il se devrait) sur le champ de bataille, son objectif ne faisant que rapporter ce qu'il saisit, de manière presque surréaliste (on imagine mal des soldats poser fièrement devant des exécutions en règle). Cette mise en scène du reportage de guerre est ainsi avant tout utilisée dans le film pour que le spectateur soit plongé directement dans l'action, les photographes devenant littéralement l’œil de celui-ci. Il devient alors essentiel de montrer, de voir pour comprendre.