Mes tripes secouées telle une bouteille de Coca te remercient, Gaspar Noé!
Tout le talent de cet auteur de cinéma est de basculer dans le malsain avec une histoire très simple.
C'est tout simplement l'histoire de jeunes danseurs qui font la fête, qui profitent joyeusement de la vie et élément perturbateur tragique, quelqu'un a distillé une drogue dans la sangria. Et là on est perdu, on ne sait pas parmi toutes ces âmes paumées douteuses auraient pu faire cet acte abominable.
Une véritable catharsis de la jeunesse française divisée par le communautarisme.
En effet, le texte qui s'affiche à l'écran au début du film: "Un film français et fier de l'être", avec le drapeau tricolore en fond, est d'une ironie flagrante. Puisque par la suite, même s'ils sont tous rassemblés par ce qui les raccroche tous à la joie de vivre, la danse, dans les dialogues, ils se méfient des uns et des autres et se critiquent mutuellement, avec des critères telles que l'orientation sexuelle, l'origine ethnique, le sexe. Voilà comment Noé arrive à faire succéder et contraster la beauté et la laideur, l'espoir et le désespoir, l'émouvant et le malsain. Les dialogues sont réalistes, d'un naturel exceptionnel pour des acteurs qui en plus ne sont des professionnels que de la danse, les personnages crachent leur méfiance ou leurs obsessions sales, telles que le sexe à l'état cru.
Puis, lorsqu'ils sont drogués, leur méfiance s'exprime alors par la violence, l'élément fétiche du cinéma de Noé, et un chaos insupportable s'installe. La lumière, la musique, les dialogues, la caméra, tout est chaotique et bouge dans tous les sens.
L'idée de maternité est aussi très présente dans le film, avec la fille enceinte, la mère du garçon, et ça se termine dans les deux cas de manière tragique. Beauté et amour détruits dans une explosion de folie furieuse, sadique, dégueulasse.
L'inceste est aussi abordé dans le film, dans un panel large de diversité sexuelle, puisqu'on a des personnages gays et lesbiennes, mais contrairement à ce qu'on pourrait reprocher au film, ces deux variantes sexuelles ne sont pas mises au même niveau. L'inceste, qui a été abordé dans Carne et Seul Contre Tous notamment, est ici vu, comme d'habitude, comme quelque chose de forcé et de malsain, mais le spectateur est libre d'y voir de l'amour. C'est là toute l'ambiguïté du réalisateur, laisser le spectateur lui-même à des avis qui peuvent être subversifs voire scandaleux. Mais cependant le sexe gay et lesbien que l'on voit dans le film est montré comme beau, des personnages qui ne s'assumaient pas avant d'être détournés par cette drogue, dans une sorte d'illumination, d'éveil total.
Voilà comment Gaspar Noé arrive à mêler malsain et beauté dans un seul film, toute l'ambiguïté et les extrêmes de la nature humaine.
On a eu le réalisme, puis le naturalisme, puis Noé nous offre encore mieux, l'abominable et le magnifique.