À sa sortie au cinéma, j'étais resté sans mot devant ce film, tout le long. Je n'avais pas réellement de pensée ni sur le fond ni sur la forme du récit, c'était un casse-tête d'essayer de relier tous les détails de chaque histoire, et puis le film est quand même très long. Mais j'étais tout de même conquis, car aucune histoire n'empiétait sur une autre, les images étaient incroyablement belles, c'était cette reconstitution et l'ambiance de chaque époque qui m'avait d'abord plu... me faisant presque oublier l'intérêt d'une telle odyssée narrative.


Depuis, je n'avais plus remis les pieds dans ce film. Je le redoutais même un peu, me disant peut-être que je n'allais plus être aussi réceptif et aussi indulgent sur la compréhension de l'histoire. Car oui, quand on regarde Cloud Atlas, plusieurs sentiments surgissent, certains vont laisser entrevoir un dégoût immédiat pour tous ces personnages et leurs destinées, prétextant que le film n'est qu'une façade aguicheuse, qu'une mascarade nous balançant de la poudre aux yeux, une belle coquille vide déchaînant une infinité d'idées sans jamais les approfondir... Peut-être bien. Mais ce n'est pas du tout mon avis et je vais tenter d'expliquer pourquoi.


Je l'avais déjà abordé dans ma critique du film "The Revenant" avec DiCaprio, je suis à chaque fois lassé par ces critiques qui incombent aux réalisateurs une "prétention" qui n'est pas la leur, ou qu'ils n'ont sans doute jamais voulu laisser transparaître... à leurs dépens. C'est bien dommage.
Et c'est aussi le cas avec Cloud Atlas, l'ambition visuelle des trois réalisateurs est démesurée mais réussie, qu'en est-il de son ambition narrative ?
Elle est pour moi réussie dans un sens qui ne conviendra pas à d'autres, ces successions de séquences aussi historiques que fantastiques ne me paraissent pas vaines. Elles sont légères mais ont une légitimité dans le message qu'elles veulent véhiculer, c'est parfois simplet, parfois alambiqué, mais c'est la somme de toutes ces actions entre les personnages qui amènent à forger sa propre interprétation.


Je n'avais pas vraiment de pensée au départ, comme je l'ai déjà dit, j'étais presque indifférent. Après ce deuxième visionnage retardé maintes fois, et connaissant bien l'animal, il m'a été plus facile de "penser" à cette histoire plutôt que de la "supporter" sans y entrer. On se pose un grand nombre de questions qui sont souvent sans réponses, et qui le resteront, mais c'est aussi un mal pour un bien car les réalisateurs ne nous prennent pas par la main pour comprendre tout l'engrenage de ce film... la liberté d'interprétation, une fois encore.


Cloud Atlas n'est sans doute pas cette aventure si complexe (qu'elle en devient détestable), elle est très simple et il n'est sûrement pas nécessaire de se bousiller le cerveau pour lui trouver une raison d'exister. Évidemment, c'est un puzzle géant mis en images, une cartographie d'une odyssée à travers les différents âges... mais au-delà de tout c’est une vitrine qui embellit les luttes psychologiques et les idéaux de chaque personnage contre leur oppresseur.


J'ai aimé cette évolution émotionnelle pour certains acteurs qui ont dû incarner plusieurs personnages, trois d'entre eux m'ont marqué : Tom Hanks, qui améliore son état d'esprit à travers le temps, il passe d'un personnage envieux et vicieux à quelqu'un de bienveillant, pour finir dans la peau d'un homme naïf hanté par un démon. Hugo Wheaving incarne le rôle de « méchant », il traîne avec lui le spectre de la méchanceté, de l'oppression, de l'intolérance et de l'hostilité tout le long du voyage. Et dans le sens contraire de Tom Hanks, les personnages de Hugh Grant se dégradent de plus en plus, il commence par être un révérend inoffensif pour finir dans la peau d'un chef de clan sanguinaire.


Cloud Atlas est un film qu'il est plus difficile d'aimer que de ne pas aimer. Je n'ai pas tout compris ni tout apprécié, et c'est peut-être bien comme ça, chacun prend ce qu'il a à prendre dans ce film et c'est ce qui fait sa grandeur à mes yeux. Cet effet miroir qu'il y a d'un récit à un autre n'est pas vain et a le mérite de faire émerger une lueur de réflexion, donnant à ce film une replaye value. Le spectacle offert paraît indomptable, il est certain que ce n’est pas un film à mettre dans toutes les mains. Toutefois, il serait dommage de pas lui donner une (seconde?) chance, car c’est visuellement splendide et ça a le mérite de sortir des sentiers battus du cinéma


On est loin du "non-sens" qu'on veut étiqueter au film. Justement, prendre indépendamment chaque histoire, c'est ça qui n'a pas de sens, dans Cloud Atlas chaque destinée est inextricablement liée à toutes les autres, et les transitions entre les histoires ne sont pas hasardeuses, elles ont une signification.

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le 29 sept. 2018

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Eren

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