Régime strict
Ce qui est bien avec Jessica Hausner, c'est qu'elle n'a pas peur de choquer ni de susciter le dégoût, et tant pis si, à l'instar d'un Ruben Östlund, elle passe pour une poseuse et une cynique. Il est...
le 27 mai 2023
11 j'aime
"Je rends, donc je suis" ? Vomito ergo sum ? Le voilà, le film à scandale de l'édition 2023 du Festival de Cannes, il y en a toujours un, qui vient en touriste (il ne cherche pas de prix) mais compte beaucoup sur le buzz à sensations qui s'emparera de la Croisette, lui faisant sa meilleure publicité. Club Zero prévient heureusement, placardant dès son ouverture un énorme avertissement pour les personnes qui sont sujettes à l'anorexie, à la boulimie, ou sont sensibles aux troubles alimentaires. À ce stade, tout le monde se demande dans quoi il s'est embarqué, et si le début et milieu du film sont assez doux, voire satiriques, avec le sujet de l'impact écologique réduit en mangeant drastiquement moins de nourriture, on ne s'attend pas à la montée en tension exponentielle dans la dernière partie, qui fait exploser tout le potentiel de son intrigue, dérange, met mal à l'aise, nous perd un peu dans son discours trop content de jouer avec la nourriture et d'en mettre partout, dont une scène-choc en particulier a fait partir certains spectateurs, écoeurés. Pour notre part, on dira que cette fameuse scène nous a marqué :
on voit les parents être soulagés que leur fille recommence à manger normalement (on est en train d'espérer vainement avec eux que ça soit une réalité), que cette dernière leur rétorque que "ils n'ont pas compris, on peut manger, si on sait se faire vomir.", qu'elle se met à dégobiller en face caméra...et remange son propre vomi.
Club Zero, à partir de cette scène-climax, va malheureusement se vautrer dans un final très attendu, incohérent avec son propos de base (si, comme la jeune fille dit, ils peuvent manger s'ils vomissent, où est la réduction d'impact écologique ? Ils consomment autant, et tirent même la chasse d'eau une fois de plus... C'est contre-productif), et ambigu sur la dernière image qu'il donne (on aurait préféré que le final montre
les jeunes idiots en train de souffrir et de mourir de faim, comme un aveu de leur embrigadement qui termine mal, plutôt que de laisser cette mort cachée et même "positive" avec le plan doucereux du Jardin d'Éden où les élus sont récompensés de leur comportement...
Pour nous, encore contre-productif). On saisit pourtant bien la critique sociale de ces jeunes riches qui s'ennuient, ont tout mais font encore la fine bouche, s'attellent à ne plus manger quand, à l'inverse, des milliards de pauvres s'évertuent à essayer de trouver un repas chaud. On adore aussi l'humour grinçant qui tourne en ridicule cette professeure (excellente Mia Wasikowska) qui est un gourou moderne, la version extrémiste des militants écologistes (le film va agacer certains vegans...). La musique rythmée est au début très appréciable (des sortes de tam-tams frappés frénétiquement) avant de devenir un refrain trop présent, qui lasse. Il n'en reste pas moins que Club Zero donne une envie de pousser les portes du premier restaurant venu, et de commander votre plat favori version XXL. Cynique, choc, malsain sur les bords, le film se perd un peu à la fin, mais nous imprime en tête cette horrible scène de "re-consommation"... On espère que vous avez l'estomac bien accroché, et on ne vous souhaite pas un bon appétit.
Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Festival de Cannes 2023
Créée
le 31 mai 2023
Critique lue 515 fois
3 j'aime
D'autres avis sur Club Zero
Ce qui est bien avec Jessica Hausner, c'est qu'elle n'a pas peur de choquer ni de susciter le dégoût, et tant pis si, à l'instar d'un Ruben Östlund, elle passe pour une poseuse et une cynique. Il est...
le 27 mai 2023
11 j'aime
Jessica Hausner est en passe de devenir une abonnée des sélections cannoises : son précédent et assez inoffensif Little Joe était en compétition en 2019, avant qu’elle ne soit membre du jury en 2021,...
le 29 sept. 2023
10 j'aime
1
Club Zero, malgré ses ambitions apparentes, tombe rapidement dans le piège de la prétention, en essayant d’être bien plus profond qu'il ne l’est réellement. Hausner semble vouloir offrir une...
Par
le 17 sept. 2024
6 j'aime
Du même critique
Un Wes Anderson qui reste égal à l'inventivité folle, au casting hallucinatoire et à l'esthétique (comme toujours) brillante de son auteur, mais qui, on l'avoue, restera certainement mineur dans sa...
Par
le 29 juil. 2021
49 j'aime
Certes, David Lynch a un style bien à lui et reconnaissable entre mille, mais il faut l'aimer, si l'on veut s'extasier devant Mullholland Drive. Subjectivement, on n'y a rien compris, si ce n'est...
Par
le 9 oct. 2021
41 j'aime
Caleb Landry Jones est vraiment stupéfiant, nous ayant tour à tour fait peur, pitié, pleurer (l'interprétation d’Édith Piaf en clair-obscur, transcendée, avec un montage si passionné, on ne pouvait...
Par
le 18 sept. 2023
40 j'aime