Sur le sujet délicat du suicide des adolescents, Keiichi Hara nous offre avec son "Colorful" un périple patient à travers la vie de l'un de ces ados qui, un jour, sans que son entourage sache pourquoi, a préféré en finir en avalant les somnifères de sa mère. Comme souvent dans l'univers du manga, le thème est abordé sous un angle apparemment fantastique, qui peut également rappeler celui que Capra utilisait dans "la Vie est Belle" : c'est accompagné d'un ange un peu paradoxal qu'une âme perdue doit affronter les milles tourments de la vie d'un lycéen presque ordinaire, rejeté par ses compagnons et doté d'un réel talent artistique. Curieusement, "Colorful" prend son temps avant de vraiment nous intéresser, et choisit d'entretenir longtemps un sentiment maussade, certes pertinent par rapport à son thème, mais pas forcément aimable pour le spectateur. Puis, un à un, les éléments du film se mettent en place, et nous voilà soumis, comme le personnage principal, à une sorte de "révélation" sur la complexité de la vie et des êtres. Si c'est un peu "chargé" - une succession de scènes superbes et émotionnellement fortes -, ce n'est pas - heureusement - aussi simpliste qu'on pourrait le craindre : la surprise finale et la conclusion, pour donner un sens à l'histoire, n'en restent pas moins douces-amères. On regrettera des dessins un peu irréguliers, une animation pas très fluides, et surtout une variation excessive de la technique utilisée pour les décors, ultra-réalistes et souvent magnifiques : ce petit bémol n'empêche pas "Colorful" d'être une belle expérience de cinéma intelligent. [Critique écrite en 2012]