Voilà un film mal-aimé, que pour ma part j'apprécie davantage à chaque nouveau visionnage.
En le voyant pour la première fois, j'avais été déçu : comment un biopic sur Coluche pouvait se révéler aussi terne, aussi triste...
J'ai fini par comprendre qu'Antoine de Caunes ne cherchait pas à tourner une comédie, choisissant de se concentrer sur la fameuse candidature à la présidentielle - autant dire pas la période la plus rigolote, d'autant que Coluche connaît au même moment des soubresauts dans sa vie privée.
Plus gênant, de Caunes commet l'erreur fatale d'oublier que le public ne connaît pas l'histoire personnelle de Coluche aussi bien que lui-même, du coup il n'introduit aucun des personnages qui gravitent dans l'entourage proche du comique, de sorte que le spectateur lambda est complètement paumé.
Après quelques recherches sur le web, le deuxième visionnage (et plus encore le troisième) m'ont permis de découvrir un tout autre film, subtil et documenté, qui décortique avec finesse les coulisses de cette candidature hors-norme, montrant ainsi les différentes facettes de l'amuseur public - à la fois le bon copain généreux, marrant et fêtard, et le mec cynique, opportuniste et cassant. Sans oublier le clown triste aux penchants dépressifs et autodestructeurs.
Pour interpréter ce rôle hyper complexe, de Caunes peut compter sur un remarquable François-Xavier Demaison, saisissant de mimétisme, qui a fourni un travail impressionnant pour s'approprier la voix et les diverses mimiques de son personnage.
Autre atout du film, son esthétique froide et assez lugubre, à l'instar de la photo très sombre de Julien Hirsch, qui pourra déconcerter mais illustre finalement très bien la descente aux enfers de Coluche durant ces quelques mois.
De Caunes choisit donc de faire revivre ces early eighties bien loin des clichés habituels (paillettes, fric et couleurs flashy), à l'aide d'une reconstitution sobre et élégante.
Finalement, ce qu'on peut reprocher à "Coluche, l'histoire d'un mec", c'est sa nature de biopic classique à la française, c'est à dire son côté album de souvenirs, best of illustré d'une époque révolue. Un peu artificiel. Un peu superficiel.
On regrettera ainsi qu'Antoine de Caunes ne creuse pas davantage le rapport étrange qu'entretient Coluche avec la chose politique, entre nihilisme mal dégrossi et volonté sincère d'aider son prochain (à cet égard, l'épilogue malicieux en forme d'allusion discrète aux futurs Restos du Coeur est une belle idée).
A quel point Coluche était-il conscient de ses insuffisances? Ainsi, la question cruciale de l'absence de programme n'est guère approfondie dans le film.
Qu'importe, "Coluche, l'histoire d'un mec" reste un biopic équilibré et un divertissement intelligent, qui vaut mieux à mon avis que sa médiocre réputation.