Ce qui surprend en étudiant le générique, c'est l'auteur du scénario : Frank Capra. On imagine mal en effet le réalisateur de Monsieur Smith au Sénat et de la Vie est belle écrivant un tel sujet ; et pourtant, il avait projeté de réaliser ce western en 1948, avec Gary Cooper dans le rôle du convoyeur, avant de finalement céder le sujet à William Wellman. C'est un excellent scénario qui aujourd'hui par son approche féministe, devrait réjouir les activistes acharnées de Metoo, bien qu'on y décèle le machisme hollywoodien typique des années 50. Si un tel sujet était filmé de nos jours, ça serait sans doute différent.
Wellman a parfaitement compris la force de ce sujet en brossant une aventure épique à travers le Far West d'une caravane essentiellement composée de 140 femmes prêtes à braver tous les périls pour aller en Californie épouser des péquenots qu'elles n'ont jamais vus. Le sujet semble saugrenu et pourtant c'est tiré d'une histoire bien réelle.
Cette longue et harassante randonnée à travers une nature hostile, déjouant le froid, la pluie, la chaleur, les crotales, les accidents de chariots, les Indiens et toutes sortes de dangers, est passionnante de bout en bout ; la transformation de ces femmes confrontées à la rudesse d'un voyage périlleux, leur formidable volonté, leur désir de ne pas rester vieille fille, leur solidarité face aux dangers et aux difficultés donnent à ce western très original une qualité indéniable.
On assiste à quelques belles scènes poignantes, aux différentes épreuves endurées par ces femmes courageuses, à des moments quasi comiques, à de beaux paysages filmés par la caméra de Wellman (dommage que la photo ne soit pas en couleurs), à l'insolence des relations entre Wyatt le convoyeur incarné par Robert Taylor, et Fifi Danon incarnée par la Française Denise Darcel, émigrée à Hollywood en 1947. La fin est aussi d'une bouleversante simplicité.
Robert Taylor était dans une période dorée de sa carrière, enchaînant de grands films (Quo Vadis?, Ivanhoë, les Chevaliers de la Table Ronde...), son personnage est presque antipathique, il mène à la dure ces femmes, mais pour leur bien, en fait il cherche sans arrêt à les protéger. Dans le reste du casting, on trouve John McIntire dans le rôle de Roy Whitman qui commandite l'expédition, et Hope Emerson dans le rôle de Patience, forte femme au tempérament blindé par l'expérience matrimoniale et la vie dure, son rôle pittoresque apporte une touche humoristique.
Wellman réalise là un de ses meilleurs films, on sent dans ce mélange d'humour et d'aventure la marque de sa personnalité haute en couleur, tout comme celle du producteur Dore Schary qui à la tête du studio MGM, cherchait à renouveler les genres cinématographiques par une approche nouvelle voire parfois audacieuse, et des sujets originaux. Il a eu raison de faire confiance à Wellman qui a réussi un western très attachant, à l'écart des sentiers habituels du western. Avoir revu ce film après tant d'années avec un grand plaisir, m'incite à remonter ma note de 8 à 9/10.