Foster,un bourgeois bien rupin,et Taupin,un clodo à la ramasse,sont réunis dans les rues d'une ville par le scénario d'un feuilleton qui régit les vies des personnes réelles.Commence pour eux une longue errance,au hasard des rencontres suscitées par les copies d'un script distribué aux passants de façon anarchique.On aura beau dire mais Bertrand Blier,comme beaucoup de choses,c'était mieux avant.Il a entamé ,précisément en 2000 avec "Les acteurs",un cycle de films énigmatiques et imbitables carburant uniquement aux dialogues non-sensiques.Il y a eu ensuite "Les côtelettes","Combien tu m'aimes" et "Le bruit des glaçons",ce dernier semblant devoir être l'ultime de la liste avant que le cinéaste ne ressurgisse inopinément neuf ans plus tard avec ce "Convoi exceptionnel",mais il ne fallait pas s'attendre à ce que les choses s'arrangent avec un réalisateur de 80 balais en bout de course.Réalisé et écrit par BB,le film s'apparente plus particulièrement à deux de ses prédécesseurs,"Les côtelettes" et "Le bruit des glaçons",autres oeuvres ultra-dialoguées axées sur un improbable duo d'hommes en perdition.On pense parfois à "Des nouvelles du Bon Dieu" de Didier Le Pêcheur,qui présentait des personnages supposés réels mais qui n'étaient que le fruit de l'imagination d'un écrivain n'étant autre que Dieu.Alors,que veut nous dire Blier?Ce n'est pas très clair à vrai dire.Ne serions-nous que les jouets d'un scénario créé par une instance supérieure?Notre existence ne serait-elle qu'une illusion,comme les cerveaux dans la caverne de Platon ou les dormeurs intubés de Matrix?S'agit-il d'un avertissement concernant les manipulations médiatiques et l'abrutissement des masses?Un brûlot politique dénonçant l'illusion de notre hypothétique libre-arbitre?Ou alors Blier s'est-il simplement livré à une plaisanterie vaseuse pour le simple plaisir d'exercer son esprit caustique?Parce qu'au-delà de la ratatouille intellectuelle,il faut reconnaître que son écriture est dans l'ensemble brillante,que c'est souvent drôle dans le genre loufoque et que c'est porté par deux génies du verbe filmé,Gérard Depardieu et Christian Clavier.Dommage que ça n'aille nulle part et que ça finisse par distiller un ennui distingué tant les situations et les personnages sont anti-réalistes.La distribution fait dans le haut standing,ce qui n'est guère étonnant dans la mesure où l'aura de Blier attire irrésistiblement les comédiens.C'est un peu comme Woody Allen,on tournerait même gratuitement pour pouvoir aligner un de ses films sur son CV.Depardieu et Clavier sont dans leurs zones de confort,l'un en grand diable hirsute et gueulard,l'autre en coincé hautain,mais ils le font tellement bien que ça passe tout seul.Il est à remarquer que Clavier était un des rares membres du Splendid à ne pas avoir bossé pour le réalisateur qui avait utilisé Lhermitte dans "La femme de mon pote",Balasko dans "Trop belle pour toi" ,Jugnot dans "Les valseuses"ou Blanc dans "Tenue de soirée".Passent donc sur l'écran Sylvie Testud,Farida Rahouadj,habituée du Blier Circus,Alexandra Lamy,Alex Lutz,Bouli Lanners,Louis-Do de Lencquesaing,Audrey Dana,Guy Marchand,Charlie Dupont,un acteur qui s'améliore,Philippe Magnan et Jean Dell,tout ce petit monde se régalant visiblement à restituer le verbe fleuri et inspiré de l'ami Bertrand.