Western crépusculaire semi-urbain, faux-semblants à la vue de tous, ce film est, à bien des égards, très étrange. Avec son prétexte totalement invraisemblable (une ville principalement peuplée de flics ripoux dont les maisons ont été payées par l’argent de la mafia et qui est administrée par un shérif à moitié sourd et volontairement à moitié aveugle) et son pitch un brin rocambolesque (le jeune flic planqué de façon grotesque par ses pairs après une bavure), il est difficile d’entièrement adhérer ensuite au déroulement particulièrement classique de son scénario. L’intérêt du film repose d’ailleurs plutôt sur ses personnages que sur son script.
Ce polar aux allures de drame noir vaut ainsi surtout pour son casting quatre étoiles. Si Harvey Keitel, Ray Liotta et Robert de Niro sont dans leur registre habituel, c’est logiquement Sylvester Stallone qui interpelle dans un rôle plus singulier. Ce n’est certes pas la première fois que Sly montre qu’il sait jouer autre chose que les gros durs (toute la première partie de carrière de l’acteur l’a envoyé dans des films éloignés de ceux qui ont fait sa réputation) mais c’est malheureusement la dernière fois qu’il est ainsi employé (les producteurs jugeant les résultats en-deçà de leurs attentes et considérant l’acteur plus rentable dans des films d’action). La principale qualité du film se trouve, du coup, plutôt là avec ses personnages, certes aussi caricaturaux que la conduite d’une intrigue vite devinée, mais avec de véritables arguments à défendre.
Le film, lui, s’il se suit avec intérêt car il ne manque pas de qualités, souffre de son rythme languissant, supposé s’appesantir sur la profondeur de rapports malgré tout très superficiels entre les personnages jusqu’à un final violent mais totalement maîtrisé par un effet de mise en scène que certains pourront juger trop appuyé. C’est pas mal, les acteurs sont au rendez-vous mais l’ensemble emprunte des routes trop balisées alors qu’il aurait gagné à prendre des chemins plus tortueux.