Adaptation par Soi Cheang du manga à destination des jeunes ados, de Izō Hashimoto sorti en 2003. Le cinéaste rendra hommage en passant à Hashimoto, co-scénariste du film, par quelques encarts tels des planches de dessins qui viennent introduire une action à venir et font de ce film en particulier, un exercice assez étonnant. Viendra également à l'esprit, Asura de Keiichi Satô, tiré du manga du même nom de George Akiyama pour traiter de l'ancrage au monde par la violence.


L'histoire de Ryo Narushima rappelle au mal-être de jeunes adolescents et Ryo (Shawn Yue) opte pour le parricide plutôt que de rejoindre la liste des Hikikomori, cloîtrés dans leur chambre, en prise avec la pression sociale. Parabole du passage à l'âge adulte, celui-ci se fera dans le sang - la première scène est d'ailleurs parfaitement amenée par une ellipse qui vient rompre l'ambiance presque idyllique d'un repas familial.


Ryo emprisonné et soumis aux brimades, viendra à bout de ses co-détenus et d'un directeur de prison acharné, grâce au soutien de Kenji (Francis Ng) maître en karaté. - Si on est surpris d'une belle descente régulière de whisky sans en vérifier les conséquences physiques -, on sera séduit par ce personnage qui utilisera Ryo à mener sa propre quête de vengeance envers une société rigoriste et pétrie de codes moraux.
Sorti de prison et prêt à tout pour s'en sortir, Ryo plongera dans le monde des combats, souvent arrangés et s'arrangera lui aussi avec la technique, optant pour la ruse à blesser ses adversaires et rejoint les combats désordonnés de Dog bite Dog. Sa quête de reconnaissance et sa haine des autres, visera à casser les règles de la perfection mais s'attirera les foudres de tous ses adversaires.


Peu de combats finalement, viendront émailler l'intrigue et ceux filmés en échecs réguliers ne serviront que de métaphore à la trajectoire avortée de Ryo. L'acteur investi dans son rôle et son physique plutôt nerveux que musclé renforce le décalage de son personnage, mais on ne saisi pas sa volonté à un tel acharnement. Vision pessimiste de la violence innée, peut-être, renforcé par un personnage qui ne procure que peu d'empathie, soumis aux caprices et à sa condition passée d'un jeune homme a qui tout souriait et qui n'entend pas en être dépossédé, il aura du mal parfois à convaincre. Un sentiment qui viendra d'ailleurs se confirmer avec la résolution concernant sa sœur déficiente mentale et abusée – On remarque alors Pei Pei dans le même type de rôle mutique que celui joué dans Dog bite Dog, qui ne lui rend pas hommage encore une fois -.


Si on passe sur des dialogues didactiques accessoires, Cheang saisi par son portrait sans concession tout le tragique des destinées. Mettant en valeur ses décors nocturnes et le vide environnant, les dangers des bas quartiers et sa population ignorée, on salue le cinéaste qui use de toute sa maîtrise filmique. Ambiance désespérée, arrêts sur image, scènes vues de loin, englobant le paysage, fondant ses personnages dans un environnement propice à la solitude. On est séduit par la photographie de Fung Yuen Man et les décors de Silver Cheung, à rendre les envolées symboliques et le surréalisme qui s'invitent dans le cheminement de Ryo.


Un an après Dog Bite Dog, Cheang reste sur sa ligne dramatique et reprend le thème des combats comme seule alternative à la survie, avant de se perdre un peu avec le moyen Accident et finir enfin par sa belle réussite qu'est Limbo. Entre temps la commande SPL de Wilson Yip, rappellera à celle de Johnnie To pour le curieux Motorway et une signature asiatique en berne qui sape le travail créatif de Cheang.
On regarde alors avec plaisir son Coq de combat.

limma
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Les meilleurs films asiatiques

Créée

le 30 sept. 2021

Critique lue 198 fois

8 j'aime

7 commentaires

limma

Écrit par

Critique lue 198 fois

8
7

D'autres avis sur Coq de combat

Coq de combat
Tybalt
7

Critique de Coq de combat par Tybalt

Bon apparemment c'est l'adaptation du manga Shamo - Coq de combat, ça transparait pas mal à la vision, oué. C'est plutôt bourrin, un peu mongolien avec des passages d'apprentissage neuneu typique,...

le 14 oct. 2010

4 j'aime

1

Coq de combat
helldraco
2

Shamo ... ça veut tout dire

Good day lecteurs ! Au programme du jour: un parricide, de l'amour, du karaté, du viol et de la survivation. Oui, ça n'existe pas comme mot, mais ce film non plus ne devrait pas exister. D'ailleurs,...

le 31 mai 2014

3 j'aime

1

Coq de combat
Ryo_Saeba
4

Critique de Coq de combat par Ryo_Saeba

Après avoir réalisé le prometteur Love Battefield qui renouait avec le polar noir et efficace du cinéma de Hong Kong des années 80/90, Soi Cheang s'était attaqué avec brio à Dog Bite Dog, un film...

le 2 oct. 2010

2 j'aime

Du même critique

Apocalypto
limma
10

Critique de Apocalypto par limma

Un grand film d'aventure plutôt qu'une étude de la civilisation Maya, Apocalypto traite de l’apocalypse, la fin du monde, celui des Mayas, en l'occurrence. Mel Gibson maîtrise sa mise en scène, le...

le 14 nov. 2016

76 j'aime

21

Captain Fantastic
limma
8

Critique de Captain Fantastic par limma

On se questionne tous sur la meilleure façon de vivre en prenant conscience des travers de la société. et de ce qu'elle a de fallacieux par une normalisation des comportements. C'est sur ce thème que...

le 17 oct. 2016

60 j'aime

10

The Green Knight
limma
8

Critique de The Green Knight par limma

The Green Knight c'est déjà pour Dev Patel l'occasion de prouver son talent pour un rôle tout en nuance à nous faire ressentir ses états d'âmes et ses doutes quant à sa destinée, ne sachant pas très...

le 22 août 2021

59 j'aime

2