C'est le titre original et ça claque bien. Mieux que ce ridicule "coup de fouet en retour" qui n'a guère de sens. Des gifles, oui, il y en a quelques unes mais je n'ai pas vu de coups de fouet, a fortiori en retour…
C'est John Sturges à la manœuvre dans "backlash" tourné en 1956. Dans sa filmographie, en termes de western, ce film suit les superbes "Fort Bravo" et "Un homme est passé" et précède "Réglements de compte à OK corral", autant dire qu'on est dans une période plutôt faste.
Je voudrais m'attarder un peu sur la scène d'introduction après le générique qui est remarquablement construite car offre à la fois une bonne intensité et une surprise. En effet, on voit un cavalier solitaire qui chevauche dans un paysage, un peu sauvage, de cactus dans une musique assez grandiose et tourmentée. Rien de surprenant car ce type de scène d'entrée doit se produire dans au moins les trois quarts des westerns. Sauf que là, on découvre qu'il s'agit d'une cavalière (Donna Reed). Après une séquence "amicale" entre Donna Reed et Richard Widmark, sans musique, telle une pause, on est brutalement plongé dans l'action avec un troisième larron juché sur la montagne qui cherche à flinguer Widmark. Et la musique reprend ses droits. Et le spectateur s'interroge sur le rôle plus qu'ambigu de Donna Reed. Quelques minutes donc après le générique et le film est lancé avec plein d'interrogations qui trouveront leur réponse peu à peu dans les 80 minutes restantes … Et je pourrais continuer encore à parler de cette scène en évoquant les prises de vue en plongée (le troisième larron juché sur sa montagne) ou en contre-plongée (superbe photo de Donna Reed sur fond de ciel bleu).
Plusieurs autres scènes du film montrent ainsi le savoir-faire certain de Sturges dans ce western, certainement à petit budget.
C'est comme la scène du bivouac entre Donna Reed et Richard Widmark qui est blessé à l'épaule. Après un soin un peu hard au couteau rougi dans le feu, on voit soudain Donna Reed qui déboutonne carrément son corsage et se retrouve en lingerie à dentelles affriolantes (on est en 1956, quand même) pour pouvoir panser Widmark dans une scène – silencieuse - chargée d'une sensualité de bon aloi. Bon, d'accord, Donna Reed avait un autre corsage dans ses affaires et le met assez rapidement (même s'il reste assez mal boutonné).
D'un point de vue scénario, on a une histoire assez simple mais avec plusieurs développements entretenant le suspense et l'intérêt de l'intrigue mais aussi certains thèmes plus intimistes comme la recherche d'un père qu'on n'a pas connu, avec même une dimension œdipienne. Le scénariste, d'ailleurs, n'est pas un inconnu ; Il s'agit de Borden Chase qui a œuvré avec d'autres grands cinéastes comme Anthony Mann (Winchester 73).
J'aime bien aussi la rencontre entre Widmark (ancien sudiste) et le sergent (ancien nordiste) qui, dans une belle relation apaisée se renvoient la politesse et le respect.
D'un point de vue acteurs, Widmark a complètement abandonné les rôles de "bad guy". Ici, son personnage est scrupuleusement honnête, à la recherche obstinée de ce père qui lui a manqué. Il est facilement ombrageux et ne s'en laisse pas compter y compris par Donna Reed. Cette dernière campe une superbe figure de femme de l'Ouest, une battante qui n'hésite pas à se mesurer à Widmark. D'égale à égal. C'est l'inoubliable actrice de "la vie est belle" de Capra.
Une fausse note, cependant, c'est le personnage inutile et bravache joué par un agaçant William Campbell.
C'est un western de Sturges intense et efficace avec des acteurs Donna Reed et Richard Widmark attachants dans leur quête et dans leur relation.