Je savais pertinemment que « Crash » intégrait la partie « hard » de la filmographie de David Cronenberg. Ce que j'ignorais, c'est qu'il était adapté de J. G. Ballard, auteur controversé dont je ne suis pas vraiment fan. L'illusion aura duré le temps du générique, étonnant, magnifié par l'excellente partition d'Howard Shore (bon, après c'est toujours le même morceau, mais il fonctionne très bien), avant que les choses ne dérapent rapidement. Il n'est même pas question de bon ou mauvais film. D'ailleurs, les sujets un peu déviants, pourquoi pas. Encore faut-il qu'il y ait quelque chose derrière, et en ce qui me concerne, le compte est très loin d'y être. Certes, cela a le grand mérite de ne pas laisser indifférent, d'être (très) original, personnel : maintenant, si c'est pour être original pour être original et personnel pour être personnel... On sent que le cinéaste cherche clairement à provoquer le scandale (ce qu'il a aisément réussi) sans vraiment chercher à aller au-delà de ce constat. Car au fond, qu'a t-on ici ? Des personnages complètement dingues (et même pas attachants), se ressemblant un peu tous niveau trait de caractère (à ce titre, avoir à ce point sacrifier Holly Hunter est incompréhensible, hormis provoquer cette « réaction en chaîne », son rôle n'a AUCUN intérêt), obnubilés par deux grandes passions : le sexe et... les accidents mortels.
Bon, la première, OK, c'est le cas de pas mal de gens. Pour autant, était-il obligatoire de le filmer autant et aussi longuement, car on frôle quand même l'érotisme tant elles sont omniprésentes du début à la fin (mention spéciale à celle où les époux Ballard s'envoient en l'air pendant que madame s'imagine de façon très explicite le corps d'un autre homme). Les accidents... Whaou. C'est juste glauque et malsain à souhait. Cronenberg, délibérément provocateur, lie ainsi intimement les deux, comme une sorte d'adrénaline ultime passant dans un premier temps
par les blessures corporelles avant le grand saut.
Et... ba c'est tout, en fait. Tout le scénario tourne uniquement autour de cette idée. Non seulement ce n'est absolument pas crédible (comment des gens aussi pervers peuvent-ils se rencontrer sur un périmètre aussi restreint), mais cela devient terriblement répétitif sur la durée
(en gros, cul-accident-cul-accident),
au point que dans la dernière demi-heure, je n'en pouvais plus, accueillant presque comme un soulagement l'apparition du générique de fin.
Alors oui, le talent du réalisateur de « La Mouche » est indéniable : dans sa logique obscure, la photographie est assez séduisante, celui-ci sait créer des images fortes, des situations pouvant intriguer
(je pense à l'accident gigantesque provoqué par Seagrave et surtout à la reconstitution de la mort de James Dean) :
il y a quelque chose de troublant sans être déplaisant, quitte à, là encore, poser un sérieux problème de crédibilité
(on peut donc se promener tranquillou au milieu d'une catastrophe autoroutière sans que ça gêne une seule seconde les pompiers : bon à savoir).
Sans oublier ce plan final ayant incontestablement de la gueule, très « voyage au bout de la folie » et sans doute le seul de l'Histoire du cinéma montrant
un couple en train de faire l'amour juste à côté d'une voiture démolie sur la route.
Mais bon... Cela fait beaucoup de souffrances et de malaise pour très peu de plaisir, la plastique parfaite de Deborah Kara Unger comprise : bref, un parfum de scandale pour une œuvre malsaine et glauque ayant bâti son destin uniquement sur ces critères : douteux, pour ne pas dire assez... scandaleux.