In the court of the Crimson Peak

"It's not a horror movie", "Mia's character is not the stereotype of the lady in distress", "It's not a ghost story but a story with ghost" nous dit Guillermo Del Toro avant la projection (oui bon j'ai le droit de me la péter un peu non ?). Malheureusement pour lui et pour le film, seule la dernière affirmation est vraie.

Pourtant, le film commençait superbement. On sent tout de suite que le film cherche à revisiter le genre du conte gothique, avec ses panoramiques d'etablishment efficaces, ses travellings enchanteurs et ses effets de "bulles cartoonesques" (vous comprendrez en voyant) originaux. Guillermo Del Toro, à défaut d'écrire des actions et des personnages sortant des lieux communs, sait clairement raconter une histoire par l'image et le montage. L'esthétique sera d'ailleurs le gros point fort du film tout du long, mettant en valeur des décors absolument somptueux et distillant une ambiance parfois délicieusement glauque, parfois romantique.

Le mélange des genres était d'ailleurs une bonne idée sur le principe. Film romantique d'époque victorienne (ou a peu près, je ne m'y connaît guère en la matière), film d'épouvante (car oui, le film fait peur), film fantastique et thriller, chaque scène change de ton et permet de créer quelques surprises en terme d'ambiance.

Le problème, c'est déjà que le film d'épouvante ne colle pas au reste. En effet, pourquoi faire des jump scares à tout va dans un tel film ? Non pas que cela m'insupporte par principe, mais ils desservent ici vraiment le film et les personnages, d'autant plus que la place de la caméra et la lumière réussissait largement à instaurer une atmosphère d'épouvante sans cela. Du coup, après m'être fait avoir trois fois dans les 5 premières minutes, je regardais le bas de l'écran à chaque moment silencieux pour ne pas sursauter (ben ouais j'aime pas sursauter !) et loupais donc de superbes plans. Merci beaucoup...

Heureusement, le film se calme pas mal dans sa deuxième partie pour davantage aller vers le thriller, mais pour faire un bon thriller il faut avant tout un bon scénario, et c'est là que le bât blesse. Quasiment tout le film est prévisible de A à Z : on sait ce que vont faire les personnages et ce qui va leur arriver avant chaque scène, surtout que le fin mot de l'histoire est déjà vu. Même au niveau de la réalisation, il y a un certain sens du montage qui rappelle maladroitement l'écriture de séries télévisées, avec des "cliffs" accompagnés d'une musique de suspense suivis d'un cut au noir.

Que ce soit doublé d'une histoire romantique, je veux bien, mais malheureusement cette romance est trop classique pour réellement émerveiller, mis à part un très joli plan vers la fin. C'est là que le film me déçoit le plus au final, car sur la simple base du thriller romantique avec des fantômes dedans, l'histoire aurait pu être énormément plus sensuelle et poétique.

Au final, difficile de dire que Crimson Peak est un mauvais film tant sa réalisation et son esthétique sont sublimes. Les décors sont impressionnants, la musique est bonne et les acteurs sont impeccables (sans pour autant être époustouflants). Mais la fadesse d'écriture des personnages et des ressorts dramatiques est beaucoup trop voyante pour ne pas laisser un arrière goût amer en bouche, convaincu que le film aurait pu être bien meilleur si son potentiel poétique avait été davantage exploité.