Voici un film qui vaut le détour. Simplement parce qu'il est très humain et porté par des personnages qui touchent par leur authenticité.

Cela fait beaucoup d'éloges, alors je développe un peu : Cameron Stuart-Mark Ruffalo est maniaco-dépressif, on ne disait pas "bipolaire" à l'époque (à vue de nez, les années soixante).

C'est lui le "daddy cool" du titre — "traduction" absurde de "infinitely polar bear" —, l'ours autour de qui le récit s'articule. Son entourage, c'est-à-dire sa femme Maggie-Zoe Saldana — forcément sublime — et leurs deux filles, Faith et Amelia, est abonné à ses sautes d'humeur : même s'il ne leur fera jamais de mal, son comportement extrême lorsqu'il est en manie, en up — c'est-à-dire pendant à peu près tout le film — a de quoi déranger, mettre mal à l'aise, voire faire peur.

Maggie, accablée par la pauvreté de leur ménage, décide de s'inscrire en MBA à New York, et de confier ses filles au mari bipolaire, ces trois-là restant à Boston.

Tout le propos du film est là : quelles sont les aptitudes parentales d'un type aussi excentrique ? À ce qu'il me semble, il inculque un certain esprit de liberté à ses filles, confrontées à ses comportements no limit, déraisonnables. Elles sont en somme conduites à se comporter en petits adultes, à chercher à mettre des limites à leur père, tout en partageant, complices, l'amour débordant de cet énergumène.

Le film a le bon goût de ne pas tenir de propos stigmatisant sur la maladie mentale : Maggie en a juste assez, voilà, d'avoir à composer avec de tels débordements. Elle fait un break avec son mari. Il s'avèrera que Cameron ne prend pas son traitement, le fameux lithium qui colle aux basques de tous les bipolaires du monde. On pouvait s'en douter.

Faut-il préférer rentrer dans la norme, au risque de perdre de sa créativité et de devoir renoncer aux excès — entre la clope collée au bec et l'alcool, il ne manque pas d'en commettre —, ou cultiver ce que le film nous décrit comme un perpétuel état de grâce, quelque peu incompris des personnes "normales" ? Il va de soi que cette représentation d'une BIpolarité qui se limiterait à un seul pôle, est cliniquement absurde. Mais ce parti pris confère une forme de poésie à l'histoire, je n'ose dire à l'intrigue puisqu'il ne se passe en définitive pas grand-chose, nulle péripétie notable hormis cette vie de famille émaillée de conflits et de rires.

Mark Ruffalo livre une prestation étonnante, touchante et très humaine, dans son rôle de père improbable. Les deux enfants sont formidables. Quant à Zoe Saldana, nommée aux Oscars pour Emilia Perez (j'écris ici en janvier 2024), ai-je dit qu'elle était sublime ?

Voilà, je voudrais tout simplement recommander ce petit film sans prétention, somme toute, mais qui transmet une forme d'énergie positive, tout du long, sans pathos, avec une insouciance qui respire la joie de vivre.

Mathieu-Erre
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le 30 janv. 2025

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Mathieu Erre

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