Lars Von Trier ne fait pas les films les plus sympas du monde. C’est toujours très violent, parfois très sexuel, et ça n’est en tout cas jamais ni doux, ni consensuel. Alors forcément, si on dit un mélodrame en forme de comédie musicale avec Björk dans le rôle principal, ça surprend. Et puis on voit la gentillesse anormale de la protagoniste et on commence à comprendre. Et puis, 2h plus tard, on pleure très fort, on a mal au ventre, et on comprend que, décidément, Lars Von Trier ne fait pas des films très gentils. La comédie musicale, pourtant édulcorante par nature, rend ici encore plus atroce le drame qui se joue sous nos yeux, puisque chaque morceau est un jalon de toutes les horreurs traversées par Björk, entre l’aliénation au travail, la perte de repères, la crainte de la mort, etc. En fait, chaque aspect de Dancer in the Dark, chaque scène, chaque plan, est minutieusement étudié pour maximiser l’horreur de la situation, ce qui fait un peu du film une sorte de drame ultime. Mais tout cela n’est pas que de la forme, car un fond, comme toujours chez Von Trier, il y en a un, et ce film, à l’instar de Dogville, sorti trois ans plus tard, est une étude acerbe des relations sociales modernes. En effet, LVT brosse ici un portrait extrêmement acerbe de l’être humain, ici une créature d’une absolue hypocrisie, à laquelle cette femme souffrant visiblement d’un léger handicap mental ne peut pas résister, s’enfermant donc dans la comédie musicale car incapable de comprendre la malfaisance qui l’entoure. Ce procédé atteint son paroxysme dans la dernière séquence, une demi-heure de cauchemar total dont on ressort changé. Dancer in the Dark est assurément un film machiavélique, qui nous rappelle à quel point, non, Lars Von Trier, c’est pas sympa du tout.