The Act of Seeing With One's Own Eyes...


Dernière réalisation en date du binôme de documentaristes formé par Verena Paravel et Lucien Castaing-Taylor De Humani Corporis Fabrica s'agit d'une authentique immersion ad nauseam dans les tréfonds du corps humain ; à la manière extrêmement crue des visions tétanisantes du gigantesque charnier ichtyen générées par l'excellent Léviathan une dizaine d'années plus tôt lesdits réalisateurs continuent de pousser les limites du visible dans leurs ultimes retranchements.


En incorporant à leur Sujet tout un système de caméras miniaturisées essentiellement destinées à s'infiltrer "là où l’œil humain ne peut naturellement aller" Paravel et Castaing-Taylor ouvre un champ des possibles à la fois fascinant et moralement proche de la plus implacable des ambivalences. Souvent abruptes, graphiquement abjectes voire largement irregardables lors de certaines séquences chirurgicales dépourvues de fioritures cinématographiques les images du documentaire sont en parfaite adéquation avec leur matériau originel : sciemment an-esthétiques, partageant avec le corps hospitalier une bonne dose de mise à distance nécessaire à toute l'ignominie ambiante les visions de chairs et de membres inlassablement triturés, manipulés, étudiés comme autant d'objets peu ou prou récupérables demeurent des plus éprouvantes et des plus mémorables.


En traitant sur un même pied d'égalité des images orthopédiques, de chirurgie oculaire, d'oncologie ou encore d'accompagnement de patients dans un hôpital psychiatrique De Humani Corporis Fabrica passe au crible le commun des mortels à renfort d'images malaisantes qui risqueront d'en rebuter plus d'une et plus d'un, images nous concernant néanmoins toutes, et tous. Un documentaire jusqu’au-boutiste qui montre le corps médical comme une infatigable machine de travail et de réajustements permanents, usine mêlée de labeur et d'une dose d'humour qui paraîtra bien mal à propos pour certains mais définitivement nécessaire in fine, dernière soupape à un quotidien particulièrement pénible et éreintant. A voir absolument.

stebbins
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le 13 juil. 2024

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stebbins

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