Ce film de guerre joue ouvertement la carte du divertissement, il n'y a pas d'exploit guerrier notoire relaté ici, et ce n'est pas une apologie de l'héroïsme, les soldats américains n'étant motivés que par l'appât de l'or qui les attend au fond d'une banque en territoire allemand. Il s'agit en fait d'un film où l'humour et même le comique le disputent à l'anti-militarisme, tourné à une époque où Hollywood brise des codes, la même année que MASH, il a souffert de la notoriété du film d'Altman qui l'a pratiquement éclipsé, c'est très injuste car il possède un sens de la dérision surprenant dans un tel contexte, souligné par la musique plutôt planante de Lalo Schifrin. D'ailleurs moi je le préfère à MASH, je préfère ce ton décontracté dans une guerre qui en plus nous concerne plus que celle de Corée.
On peut y voir comme une forme de western transposé dans la Seconde guerre mondiale sur le front français, où des soldats visiblement las et désoeuvrés ont décidé de devenir des mercenaires cupides. C'est pourquoi il est intéressant de redécouvrir ce film tourné en grande partie en Yougoslavie reconstituant des décors de village lorrain autour de Nancy. Brian G. Hutton venait de réaliser un excellent film de guerre, sérieux celui-là, Quand les aigles attaquent avec déjà Clint Eastwood ; malgré ce ton subversif, le film n'exclut pas la violence des combats, la vacuité de la guerre avec tueries et explosions.
L'interprétation sert parfaitement ce propos, avec Clint qui est le cerveau de cette opération et qui partage la vedette avec Telly Savalas dans le rôle d'un sergent énergique qui est particulièrement brillant, Donald Sutherland (qu'il retrouvera 30 ans plus tard dans Space cowboys qu'il dirigera) qui incarne un chef tankiste surnommé "le cinglé", une sorte de hippie au langage pseudo-philosophique, et toute une escouade de seconds rôles où l'on reconnait le jeune Harry Dean Stanton, Dan Rickles, Perry Lopez, Stuart Margolin, Gavin McLeod ou Carroll O'Connor dans le rôle d'un général un peu toqué. Un film de guerre bien étonnant, vraiment pas sérieux, mais très plaisant.