Franco Amore porte bien son nom. Il dit de lui-même que, durant toute sa vie, il a toujours essayé d’être un honnête homme, un policier qui, en 35 ans d’une honorable carrière, n’a jamais tiré sur personne. A la veille de sa retraite, il accepte un convoyage qui se transforme en descente aux Enfers....
Dans les années 70, beaucoup de réalisateurs italiens (Lizanni, Di Leo...) avaient tourné à Milan (Bandits à Milan, Milan calibre 9...) , épicentre de nombreux polars violents et amoraux "bisseux" qui sont demeurés l'apanage de cinéphiles en mal de sensations fortes.
Depuis, le polar italien a fait peau neuve avec le superbe Romanzo criminale puis Suburra.
C'est avec une proposition assez réaliste et dramatique qu'Andrea Di Stefano revient sur les écrans avec Dernière nuit à Milan. Milan était la capitale du crime dans les poliziesco italiens des années 70. Elle est depuis longtemps la capitale de l'industrie italienne mais puisque rien ne change vraiment jamais, Milan demeure toujours aujourd'hui un poumon du crime organisé international.
Milan la nuit....
Le film commence par le survol de la ville italienne la nuit tombée, une petite fête pour célébrer le départ en retraite le lendemain de Franco est organisée par sa femme mais le principal intéressé n'est pas là.... Policier prudent, Franco Armore a effectué une carrière prudente mais frustrante, il est amer. Il accepte, un peu malgré lui, de convoyer pour un clan mafieux chinois une importation illégale de diamants venue de Chine alors qu'il est toujours en activité. L'opération "tourne" au fiasco intégral. Contrôlé par de "faux Carabinieris", trahi par des cousins de sa jeune femme Viviana qui sont les donneurs d'ordre, Franco voit Dino, son meilleur ami et collègue se faire "truffer" de balles, il parvient à répliquer et à s'extraire du tunnel où le guet apens s'est déroulé, laissant 4 cadavres derrière lui. Soupçonné d'entrée par son commissaire, il est convoqué sur les lieux du guet apens et doit répondre aux questions de la procureure. Il organise le départ de Viviana qui a récupéré les diamants, du fils de son ami Dino et décide de solder ses comptes, puisque pour lui, les "carottes sont cuites". "Coincé" entre la mafia chinoise et la police italienne qui doit trouver un coupable, ses droits à la retraite après 35 ans de loyaux services vont "sauter" et c'est la prison qui l'attend.
Ils avaient dit que vous ne tireriez pas.....
Ce sont les derniers mots de la carabinieri qui a controlé le véhicule avant de pousser son dernier soupir en se vidant de son sang. Réputé prudent, voire trouillard, Franco comprend vite qu'il a été choisi, pour le convoyage comme pour le guet apens, pour son profil de flic réputé faible.
Il reconstitue rapidement le puzzle, neutralise Cosimo le ventripotent donneur d'ordre qui a organisé le braquage et revient voir les chinois, qui sont, on ne peut plus nerveux. Abandonnant Cosimo aux chinois, il quitte le rooftop en précisant crânement à ses interlocuteurs qu'il gardera les bijoux compte tenu que l'opération va lui coûter sa carrière et surtout ses droits à pension. Revenu dans la Porche de Cosimo, Franco salue ses collègues lors d'un dernier appel radio poignant. Ceux ci ignorant tout du drame qui se dénoue, lui répondent chaleureusement par un concert de klaxons qui va crescendo alors que Milan s'éveille, tandis qu'un homme surgit au coin de la cathédrale et vient dans sa direction....
Dernière nuit à Milan est un polar noir psychologique réussi qui privilégie la réflexion à l'action. La tension du film passe par des regards entre les différents protagonistes et des plans rapprochés sur des visages tendus. Son ambiance sombre est renforcée par la bande originale soignée de Santi Pulverenti. L'entame du film et le déroulement de son scénario en boucle permettent au spectateur de mesurer les enjeux, de faire connaissance avec les principaux protagonistes et de comprendre comment la "souricière" va se refermer inexorablement sur le capitaine de police. Les faits se déroulant presque exclusivement de nuit renforcent la noirceur de l'intrigue. Pierfrancesco Favino est, comme souvent, trés bon dans le rôle de ce personnage réaliste, trahi par le Fatum qui se retrouve au pied d'un mur qu'il ne peut franchir. Profondément amer, il doit donc faire le moins mauvais des choix alors que son destin est scellé, victime des circonstances.
Au delà de la tragédie qui frappe son personnage principal, une thématique commune à de nombreux films noirs, il est difficile de ne pas voir dans Dernière nuit à Milan une mise en abyme sur l'injustice et le mauvais sort qui frappe au hasard....
La justice n'est pas de ce monde mais elle n'est pas de l'autre non plus...
Trailer
Ma note: 7/10