Taïga con dios.
[Série "Dans le top 10 de mes éclaireurs : Ochazuke] Lorsqu’on jouit d’une filmographie aussi dense et prestigieuse que celle de Kurosawa, le défi pour se renouveler et poursuive son œuvre peut...
le 24 janv. 2015
93 j'aime
11
Et voila, je viens de regarder mon premier Kurosawa. Le haut du panier des réalisateurs appréciés par la communauté SC, faisant l'unanimité chez mes éclaireurs et reconnu comme un des plus grands maîtres de la caméra. En fait ce film je l'ai surtout choisi pour son histoire et son environnement. Je suis un immense admirateur des œuvres exposant la beauté de la nature, des paysages grandioses au petits détails de la vie dans ces contrées. Alors forcément, les pérégrinations d'un chasseur et d'un soldat dans la Taïga, réalisé par un demi-dieu du cadrage et trônant tout en haut du top des films louant la beauté de la nature...On était destiné à se croiser.
Bien sûr la claque visuelle était au rendez-vous, les décors Sibérien explosent dans toute leurs rudesse et leurs immensités . L'expédition hasardeuse sur le lac est époustouflante de naturel, la vivacité des bourrasques et l'atmosphère glacial se font sentir jusque de l'autre côté de l'écran. J'ai autant souffert pour le Capitàn que pour l'équipe de tournage qui a du se geler les os des heures durant pour nous offrir ce spectacle.
Kurosawa traite avec beaucoup de sensibilité la rencontre des deux hommes. La notion de respect est au cœur de l'oeuvre, vis à vis de la nature, de ses ressources, de ses dangers et surtout des deux protagonistes qui ont toujours et immédiatement su capter la bienveillance l'un de l'autre. L'histoire se met lentement en place, quelque chose de très commun, partant d'une troupe militaire, plutôt terne, puis coloré par la présence rafraîchissante d'un Golde à la morale bouleversante. De longues minutes on les regarde assis au bord du feu, pas le moindre mot, aucune expression, seulement ce crépitement berçant la quiétude des deux compagnons. Le rythme se pose ainsi et s'articule de manière très maîtrisé autour des codes et de la tendresse de Dersou qui malgré un milieu si peu hospitalier sauront toujours surprendre le Capitàn.
Puis advient la malédiction d'Amba, frappant fatalement Dersou comme un coup de massue. La pellicule s'assombrit, et le sort du chasseur est on le devine, déjà scellé. Et là ça me paraît tellement évident que j'ai peur de dire une belle connerie ( n'hésitez pas à me traiter de demeuré dans les commentaires et me dire pourquoi cette idée est stupide et que je ferai mieux de la fermer au lieu de critiquer).. Mais pourquoi le Capitàn il ne lui a pas acheter des lunettes à Dersou? Je me suis un peu renseigné quand même, çà existait déjà depuis longtemps à l'époque, je pense qu'un type comme le Capitàn il aurait pu lui trouver un ophtalmologiste... non, c'est là que je me tais et que j’arrête de tourner en dérision le pathos de la situation? Si je me pose cette question ce n'est vraiment pas pour chercher la petite bête, mais parce que le personnage de Dersou est tellement attachant que je me suis pris de pitié pour le petit bonhomme. Et l'aveugle dans l'histoire serait plutôt notre bon Capitàn, incapable de se rendre à l'évidence que le petit homme des bois ne se fera jamais à la vie citadine.
À noter aussi que la qualité de l'image mériterait un petit lifting, mais si il y'a bien un moment où elle sert le film, c'est lors des retrouvailles, quand on ne peut que distinguer la silhouette d'un voyageur trapu interpellé au loin. Puis soudain survient cette réponse en écho, ressuscitant des profondeurs de la taïga: " CAPITÀN!" J'ai pas du être le seul à en esquisser un sourire large comme la moustache du Capitàn...
Et voila, je viens de regarder mon premier Kurosawa. Une grosse bouffée d'authenticité, une manière très propre de poser son cadre et de monter son histoire. Sans néanmoins pouvoir trouver le moindre défaut à cette très belle oeuvre, je m'attendais à un petit quelque chose de plus, une petite touche de fantaisie, un je ne sais quoi d'un peu plus vibrant. Comme si le film était bridé par le format d'une histoire vraie, n'osant pas s'écarter de ce sentier de peur de perdre de sa saveur si pure. Pas de quoi refroidir mon enthousiasme pour autant, Dersou Ouzala reste un film touchant et soigné qui respecte tout jusqu'au cinéma lui même.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Dans l'ombre du top 10
Créée
le 23 sept. 2014
Modifiée
le 24 sept. 2014
Critique lue 434 fois
7 j'aime
3 commentaires
D'autres avis sur Dersou Ouzala
[Série "Dans le top 10 de mes éclaireurs : Ochazuke] Lorsqu’on jouit d’une filmographie aussi dense et prestigieuse que celle de Kurosawa, le défi pour se renouveler et poursuive son œuvre peut...
le 24 janv. 2015
93 j'aime
11
Dersou Ouzala, c'est d'abord la renaissance du Phoenix Kurosawa qui après l'échec cuisant de Dodes'kaden a tenté de se suicider, fort heureusement, ce fut un échec. Il nous revient 5 ans après avec...
le 2 sept. 2013
90 j'aime
5
Exploiter l’adversité que réserve dame nature aux intrépides aventuriers pensant amadouer le sol de contrées qui leur sont inhospitalières, pour construire l’attachement réciproque qui se construit...
Par
le 14 déc. 2014
58 j'aime
8
Du même critique
Fin de séance, le générique défile à peine, les petites lumières tamisées se rallument doucement. À ce moment on croise généralement dans la salle 3 types de spectateurs qui ont apprécié le film: Le...
Par
le 28 janv. 2015
20 j'aime
2
Il a pris du galon Gareth Evans! Apres un premier opus de The Raid où il avait superbement fait valoir son talent à mettre en scène et chorégraphier les combats, il récidive en allant toujours plus...
Par
le 29 juin 2014
12 j'aime
C'est arrivé près de chez vous n'a pas de scénario, aucune histoire derrière la pellicule. C'est en réalité un documentaire sur le quotidien de Ben. Cet homme incarné par un énorme Benoît Poelvoorde...
Par
le 2 juil. 2013
12 j'aime
5