A force with no name.
Le désert, des migrants mexicains, un texan psychopathe bien décidé à régler le problème de la porosité des frontières à sa manière : le scénario de Desierto tient sur l’épine d’un cactus...
le 6 nov. 2016
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Cette critique sera garantie sans spoilers, car Desierto est un film qui ne contient aucun scénario. L’heure vingt de dur labeur se résume à une course poursuite en quatre temps, dont le troisième est une variante du deuxième, qui est une variante du premier. Dix migrants détalent comme des lapins dans un désert, un vieux roublard leur tire dessus sans qu’on ne connaisse ses motivations, et c’est tout, sans qu’on ne puisse y insérer un « à peu près ». La preuve que le talent n’est pas héréditaire est contenue toute entière dans ce malheureux Desierto, qui constitue à lui seul la plus belle coquille vide de l’année 2016. Ce n’est même pas révoltant, ou scandaleux, ça ne sert juste à rien. Donc, à la limite, c’est simplement fatiguant. Pourtant, la grande cavalerie avait été rameutée pour le spectacle: papa en aide secondaire, qui aurait mieux fait de retirer son nom du générique afin de ne pas phagocyter sa propre carrière personnelle, Woodkid au son, Gael García Bernal à l’action. Alfonso est inutile, puisque le néant n’a pas été évité. Woodkid en fait des caisses, à coup de batterie où c’est à qui qui tapera le plus fort sur la caisse pour tenter d’insuffler un suspense inexistant, et Gael García Bernal est aussi peu crédible en migrant mexicain qui n’a pas un rond et veut traverser la frontière qui sépare son pays d’origine des États-Unis que l’a été Nathalie Portman en caissière mal fagotée dans Hesher.
Il y a deux choses à sauver, et pour cela, on se voit bien obligé de creuser jusqu’à trouver de l’eau de mer, par pure clémence: un plan fixe au début, avec un lever de soleil, un plan fixe à la fin, avec un coucher de soleil. Et, rien que de l’écrire, on voit déjà l’ennui qui pointe le bout de son nez tant cela apparaît aussi excitant que la saison des poireaux. Mais, si filmer les golden hour sans lyrisme particulier est insipide, cela n’en reste pas moins correct, tant le reste se situe six pieds sous terre. Cuarón, en présentation de son placenta, exprimait son intention de faire du désert un personnage à part entière, dans le film. Intention louable, s’il en est, et qui aurait mérité mieux qu’une photographie digne des buildings de Manhattan. On aura rarement vu un désert aussi laid, une déchèterie sans déchets, d’une blancheur qui se rapproche plus de l’écru au titre de salissure que de l’incandescence.
Et que dire des personnages. On s’en contrefout. Pas parce qu’on a un coeur de pierre, mais parce que Cuarón ne fait strictement rien pour qu’on s’y intéresse. On ne connait pas leur histoire, on ne connait pas leur prénom. Ce ne sont même pas des numéros. Ce sont juste des types lambda qui parfois meurent dans des conditions relativement stupides. Un bonhomme vient les chasser à coup de fusil ? Quoi de mieux que de se mettre en plein milieu d’un plateau à découvert pour être plus facilement tué ! Une possibilité de mettre fin à ce cauchemar en le poussant dans le vide ? Non, on va se jeter avec lui, c’est plus intelligent. Et tout le film est ainsi, illogique, incohérent, ridicule, mal fichu. On a un chien sous amphétamines, qui sait tout faire, une sorte de Beethoven du psychopathe. Il mange les gens sur ordre, il saute par un bond de chamois de la fenêtre d’une voiture, il sent les choses à des kilomètres, il fait plus de 40 degrés mais il ne se fatigue jamais. A noter que quand il décide de tailler dans le lard du bras d’un gringo, il apparaît au plan suivant sans une seule trace de sang. Un médor de choix !
Et tout cela, toute cette course poursuite où l’IA d’un mauvais jeu vidéo semble s’être emparée de pauvres migrants pour quoi ? Parce que Gael García Bernal est un mexicain qui a été refoulé à son entrée dans les États-Unis pour avoir roulé avec un phare cassé. Replantons le décor: moment d’émotion, avec une femme, désespoir de deux âmes esseulées qui ont besoin de partager leur détresse, pour qu’on apprenne que cette galère se résume à un phare de voiture cassée. Et l’autre de hocher la tête, les yeux plein de poussière, pour marquer son émotion.
Il est inutile d’aller plus loin, c’en est trop. Tout le film est construit de cette façon. Le scénariste ferait mieux de réfléchir à son travail médiocre, que de s’afficher en présentation des avant-premières. Que la postérité oublie vite le nom de Jonas Cuarón, et vite.
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Créée
le 31 mars 2016
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